mardi 12 mai 2015

Pierre-Antoine Lemoine (1605-1665)



Pierre-Antoine Lemoine (1605-1665)
Nature morte aux raisins,  plat de pêches et potiche chinoise sur un entablement de pierre.
Collection privée

Que voit-on ?  Sur un entablement de marbre fendu posée sur un plateau d'argent en équilibre symbolisant l'instabilité de biens terrestres, deux pêches et un melon caractérisant les qualités de coeur et la douceur de vivre.  Encadrant une potiche en porcelaine de Chine représentée avec un luxe de détail,  digne des meilleurs trompe-l'oeil, des grappes de raisins accrochés à leurs feuillages dont la texture est remarquablement rendue, ce qui est la caractéristique de ce peintre.  Sur le bord de l'entablement et projetant sur lui une ombre : une figue noire ouverte d'un troublante sensualité, dont la position instable en porte à faux sur les fruits et le vide vient rappelant la fragilité des plaisirs de la chair.

Rappel biographique : le peintre français Pierre-Antoine Lemoine appartient à ce corpus de peintres du début du 17e siècle dont peu d'éléments nous sont parvenus mais qui semble avoir été très considéré en son temps : « Pierre Antoine Le Moine de Paris peignit les fruits avec beaucoup de finesse & de légèreté. » L'artiste fut pourtant totalement oublié jusqu'à la réapparition, sur le marché de l'art en 1992, de son morceau de réception à l'Académie Royale de Peinture et de sculpture. Également musicien, il bénéficia de recherches en archives par Michel Faré et Claudia Salvi,  laquelle a récemment remarqué que ce morceau de réception constituait « un évènement très important pour l'histoire de la nature morte en France  au 17e siècle »
« Vous estes prié d'assister au Convoy, Service et Enterrement de Monsieur le Moine, vivant Peintre du Roy en son Académie Royale de Peinture et Sculpture, ordinaire de la musique de la Chambre de Sa Majesté et de Monsieur ; décédé en sa maison, rue des Déchargeurs, qui se fera Jeudy, 20 Aoust 1665, à dix heures du matin, en l'église de St Germain l'Auxerrois, sa Paroisse, où il sera inhumé; les Dames s'y trouveront s'il leur plaist. »
Membre d'une maîtrise vieillissante, et malgré les avis défavorables de Charles Le Brun   et d'Eustache Lesueur,  Lemoine est admis à  l'Académie en 1654 et il en deviendra un membre important et remarqué puisque son " morceau de reception " sera offert en présent au cardinal de Mazarin. En 1657, il est chargé « d'orner le logis » du chancelier Pierre Séguier, ce qui parachève de le rendre célèbre.  Les œuvres de Lemoine (environ quatre toiles signées à ce jour), prouvent à elles-seules combien l'artiste avait la maitrise du réalisme des fruits, un sens de l'observation aiguisé et possédait l'art de la traduction des saveurs. À une remarquable qualité picturale parvenue jusqu'à nous, s'ajoute en effet, une certaine volupté des textures fruitières, dans une tradition française alors principalement représentée par Pierre Dupuis, et  un talent de coloriste enthousiasmant.

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