jeudi 12 octobre 2017

Jean-Baptiste-Siméon Chardin (1699-1779) - Canard mort pendu par la patte, avec pâté, écuelle et bocal d’olives,

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Jean-Baptiste-Siméon Chardin (1699-1779)
Canard mort pendu par la patte, avec pâté, écuelle et bocal d’olives, 1764.
Museum of Fine Arts, Springfield

 Que voit-on ?  Il s'agit d'une nature morte ovale représentant des Rafraîchissements, des Fruits & des Animaux. Elle fait partie d'une groupe de trois et doit être placée au milieu des trois selon la notice du Salon de 1765 où elle fut présentée, notice rédigée par la plume de Diderot en ces  termes : 
" S’il est vrai qu’un connaisseur ne puisse se dispenser d’avoir au moins un Chardin, qu’il s’empare de celui-ci. L’artiste commence à vieillir. Il a fait quelquefois aussi bien ; jamais mieux. Suspendez par la patte un oiseau de rivière. Sur un buffet au-dessous, supposez des biscuits entiers et rompus, un bocal bouché de liège et rempli d’olives, une jatte de la Chine peinte et couverte, un citron, une serviette déployée et jetée négligemment, un pâté sur un rondin de bois, avec un verre à moitié plein de vin. C’est là qu’on voit qu’il n’y a guère d’objets ingrats dans la nature, et que le point est de les rendre. Les biscuits sont jaunes, le bocal est vert, la serviette blanche, le vin rouge, et ce jaune, ce vert, ce blanc, ce rouge, mis en opposition, récréent l’œil par l’accord le plus parfait. Et ne croyez pas que cette harmonie soit le résultat d’une manière faible, douce et léchée. Point du tout ; c’est partout la touche la plus vigoureuse. Il est vrai que ces objets ne changent point sous les yeux de l’artiste. Tels il les a vus un jour, tels il les retrouve le lendemain. Il n’en est pas ainsi de la nature animée. La constance n’est l’attribut que de la pierre. " (Diderot, Salon de 1765, Bouquins, p. 348.)

Rappel biographique : Jean-Baptiste-Siméon Chardin est considéré comme l'un des plus grands peintres français et européens du 18e siècle. Célèbre pour ses scènes de genre et ses pastels, il est aussi reconnu pour ses natures mortes dont il reste le maître incontesté. D'après les frères Goncourt, c'est Coypel qui en faisant appel à Chardin pour peindre un fusil dans un tableau de chasse, lui aurait donné le goût pour les natures mortes. A partir du Salon de 1748, Chardin expose de moins en moins de scène de genre, il multiplie désormais les natures mortes. Ce retour à ce type de peinture va durer une vingtaine d'années. Il est difficile de donner des raisons à ce changement de cap. On sait que pendant cette période la vie de Chardin est en pleine mutation. Il se remarie, il reçoit une pension du roi. Il est désormais à l'abri du besoin. Ces deux tableaux de réception à l'Académie Royale de peinture sont tous deux des natures mortes, La Raie et Le Buffet qui se trouvent aujourd'hui au Musée du Louvre (salle 39) . Chardin devient ainsi peintre académicien « dans le talent des animaux et des fruits », c'est-à-dire au niveau inférieur de la hiérarchie des genres alors reconnus. Et c'est sans aucun doute Chardin qui va lui donner ses lettres de noblesse et en faire un genre pictural égal, voire même supérieur à bien des égards, aux autres.
Les natures mortes qu'il peindra à partir de 1760 sont assez différentes des premières. Les sujets en sont très variés : gibier, fruits, bouquets de fleurs, pots, bocaux, verres...  Chardin semble s'intéresser davantage aux volumes et à la composition qu'à un vérisme soucieux du détail, ou aux effets de trompe-l'œil. Les couleurs sont moins empâtées. Il est plus attentif aux reflets, à la lumière : il travaille parfois à trois tableaux à la fois devant les mêmes objets, pour capter la lumière du matin, du milieu de journée et de l'après-midi. On peut souvent parler d'impressionnisme avant la lettre.
Chardin cherchait à reproduire la matière, ces fruits semblent aussi vrais que nature, Diderot s'extasiait devant ce réalisme dans son compte-rendu du Salon de 1759 : " Vous prendriez les bouteilles par le goulot si vous aviez soif ". ou encore en 1763, " C'est la nature même; les objets sont hors de la toile et d'une vérité à tromper les yeux. (...)
 Pour regarder les tableaux des autres, il semble que j'ai besoin de me faire les yeux ; pour voir ceux de Chardin, je n'ai qu'à regarder ce que la nature m'a donné et   m'en bien servir ".
" O Chardin ! ce n'est pas du blanc, du rouge, du noir que tu broies sur ta palette: c'est la substance même des objets, c'est l'air et la lumière que tu prends à la pointe de ton pinceau et que tu attaches sur la toile ".

2017 - A Still Life Collection 
Un blog de Francis Rousseau, #AStillLifeCollection, #NaturesMortes 

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