Johannes Torrentius (1589-1644)
Still life with flagon, glass, jug and bridle.
Le peintre néerlandais Johannes Torrentius de son nom complet Johannes Symonsz Jan van der Beeck soupçonné d'être membre des Rose-Croix, fut arrêté, torturé et condamné en 1627 à 20 ans d'emprisonnement, pour usage de la magie à cause même du tableau que nous avons sous les yeux. Le roi Charles 1er d'Angleterre qui admirait ses œuvres intervint en sa faveur et obtint personnellement sa relaxe après deux années de prison. Il le fit venir en Angleterre où Torrentius resta 12 ans en Angleterre comme peintre de la Cour, puis retourna en 1642 à Amsterdam, où il mourut deux ans plus tard. Son tableau le plus célèbre et l'un des rares - pour ne pas dire le seul - lui ayant survécu, est donc celui présenté ici, "Nature morte avec bride et mors" qui est conservé aujourd'hui au Rijksmusum d'Amsterdam.
Il a donné son titre à un recueil d'essais sur la Hollande du 17e siècle du poète polonais Zbigniew Herbert (réédition Le Bruit du temps, 2012).
On aura compris qu'il s'agit d'un tableau célèbre et emblématique qui dépasse largement le cadre de la représentation de natures mortes habituelles. En regardant le tableau de près, et en examinant ses transparences (notamment celles du verre central où se reflète la fenêtre d'une pièce) ou les reflets presque impossible a saisir du premier coup d'oeil sur le mors en metal, étrangement disposé au-dessus du verre), on comprend effectivement mieux pourquoi les contemporains de Torrentius pensait qu'il avait usé de magie pour obtenir un tel résultat.
Constantin Huygens écrivit à ce sujet: "... vraiment pas facile pour n'importe quel peintre devant son chevalet de représenter ces verres, cette faïence, cet étain et les autres les objets en fer contenus dans ce tableau, avec de telles transparence, saisies sous de tels angles et uniquement par la force du pinceau... ".
En 1635, le graveur Michel Le Blon écrit dans une lettre à l'ambassadeur de Suède à La Haye : " Il est absolument impossible de déceler par quoi et par où Torrentius a commencé ce tabeleu et par quoi il a fini, il semble ni avoir ni début, ni fin... de sorte que ce tableau semble avoir été peint d'une seule traite comme dans un brouillard."
Comme il se dégage toujours aujourd'hui encore de cette nature morte uns étrange sensation, de nombreux experts ce sont pencher sur sa facture et ont pensé que Torrentius avait pu atteindre ces effets si particuliers de transparences en appliquant de très nombreuses couches successives extrêmement minces. Lorsque la peinture a été examinée lors de sa restauration en 1993-1994, cependant, le nombre de couches s'est avéré plutôt limitée et pas du tout au-dessus de ce que les peintre de l'époque de Torrentius avait l'habitude d'appliquer. La "magie" dont a accusé Torrentius tiendrait donc dans les pigments utilisés sur lesquels il n'a d'ailleurs jamais voulut apporter d'éclaircissements pendant son procès, ce qui lui a valu sa terrible condamnation.
Condamner pour avoir peint une nature morte parfaite : cela est arrivé au moins une fois dans l'histoire de l'art !
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2015 - A Still Life Collection
Un blog de Francis Rousseau