mercredi 31 mai 2017

Pablo Picasso (1881-1973) - Still-Life 1937



Pablo Picasso (1881-1973)
Still-Life, 1937
Oil on canvas, Private Collection

Que voit on ? Une nature morte extrêmement interessante de Picasso qui représente, posés sur une planche en bois dont une partie de la peinture de tranche a été arrachée et laisse le bois à nu, trois objets à identité africaine. A gauche : un masque (extrêmement émouvant) taillé à la hâte dans une boîte à chaussure en carton. Au milieu : un instrument de musique qui semble être un xalam (mandoline africaine) très primitif mais qui ressemble beaucoup plus à un shamizen japonais. A droite : une feuille de papier journal roulée en longue vue et repliée sur elle-même.  C'est une des rares incursions aussi frontales de Picasso du côté du Surréalisme... bien que la composition reste résolument cubiste.

Rappel biographique : le peintre espagnol Pablo Ruiz y Picasso qui a passé l'essentiel de sa vie en France, fut aussi dessinateur et sculpteurUtilisant tous les supports pour son travail, il est considéré comme le fondateur du cubisme avec Georges Braque auquel son nom est lié surtout dans le domaine des natures mortes. Il est considéré comme l'un des plus importants artistes du 20e siècle tant par ses apports techniques et formels que par ses prises de positions politiques et que par l'immensité de son production tous genre confondus, que l'on chiffre à près de 50 000 œuvres.
Les premiers collages et assemblages sont réalisés pendant l'hiver 1912, Nature morte à la chaise cannée (Paris, Musée Picasso), Guitare(s) en carton (Paris, Musée Picasso). A partir des années 20 ses natures mortes seront très proches, sur la même ligne de conception " cubiste analytique " que celles de George Braque, dont il devient un temps l'intime avant de s'en séparer définitivement.  Il y eut une connivence d'inspiration très rare entre ces deux peintres pendant une certaine période de leur vie et en particulier dans le domaine particulier du traitement de la nature morte. 
Picasso peint  beaucoup d'autres natures mortes après la Seconde guerre mondiale et hors de la période cubiste, mais ce n'est pas un genre qui tient une place aussi essentielle dans son oeuvre que dans l'oeuvre de Georges Braque.
Deux figures au bord de la mer est peint en janvier 1931, et en mars, Nature morte sur un guéridon. Cette année-là, voit également l'édition de deux livres majeurs : Les Métamorphoses d'Ovide (Lausanne, Skira) et Le Chef-d'œuvre inconnu de Balzac (Paris, Ambroise Vollard).
En 1932, Jeune fille devant le miroir est finie. Une rétrospective à la galerie Georges Petit, puis au Kunsthaus de Zurich, a lieu en juin. Picasso travaille à Boisgeloup aux têtes sculptées d'après Marie-Thérèse et à la série de dessins d'après La Crucifixion de Matthias Grünewald. De juin à septembre 1934, il fait des séries de corridas, peintes, dessinées et gravées. En août, il voyage en Espagne avec Olga et Paulo, et se rend aux corridas de Burgos et de Madrid. Il visite le Musée d'Art catalan de Barcelone. Il réalise une série de sculptures à texture moulée : Femme au feuillage et Femme à l'orange. Au printemps 1935, la galerie Pierre expose des papiers collés. Minotauromachie est gravée. Il se sépare d'Olga en juin, et le 5 septembre, naît Maya Picasso, sa fille avec Marie-Thérèse Walter. Le 25 mars 1936 voit le départ secret de Picasso avec Marie-Thérèse et Maya pour Juan-les-Pins. Il fait des gouaches et des dessins sur le thème du Minotaure. Cette même année, au début de la Guerre civile espagnole, il est nommé directeur du Musée du Prado à Madrid. C'est sans doute a cette époque qu'il rencontre les premières natures mortes inscrites dans un cadre du peintre de l'âge d'or,  Juan Sanchez Cotan.

2017 - A Still Life Collection 

Un blog de Francis Rousseau, #AStillLifeCollection, #NaturesMortes 

mardi 30 mai 2017

Joan Miró (1893-1983)


Joan Miró (1893-1983)
 The Ear of Corn 1922
 MOMA, New-York 

Que voit on ?  Présentée dans une tonalité monochrome sur une encoignure posée contre un mur dont l'angle a été effacé :  un épis de blé, un filtre à thé et une théière, le tout intitulé de façon assez sybilline " L'oreille du Blé", sachant que dans le titre original il existe un jeu de mot entre Corn et Corner (le Coin) ce qui - il faut bien l'avouer - ne nous éclaire pas beaucoup plus sur les intentions du Miro mais nous renseigne amplement sur les errements syntaxiques du mouvement Surréaliste ! Dans l'oeuvre Miro, qui a peint fort peu de natures mortes figuratives, celle-ci, est l'une des plus résolument Surréalistes.   

Rappel biographique : Le peintre espagnol Joan Miró, (Joan Miró i Ferrà) qui se définissait comme  un « catalan international» fut l'un des principaux représentants du mouvement surréalisteSes premières peintures dont on peut considérer que cette nature morte fait partie, dénotent une influence claire du fauvisme et du cubisme montrant une certaine proximité de couleurs avec Van Gogh et quelquefois même Cézanne.  
Il abandonne leu à peu  les couleurs et les formes dures utilisées jusqu'alors pour les remplacer par d'autres plus subtiles. Il explique cette démarche dans une lettre à son ami Ricart en date de 1918 :
« Pas de simplifications ni d’abstractions. En ce moment je ne m’intéresse qu’à la calligraphie d’un arbre ou d’un toit, feuille par feuille, branche par branche, herbe par herbe, tuile par tuile. Ceci ne veut pas dire que ces paysages deviendront cubistes ou rageusement synthétiques. Après, on verra. Ce que je me propose de faire est de travailler longtemps sur les toiles et de les achever autant que possible. À la fin de la saison et après avoir tant travaillé, peu importe si j'ai peu de toiles. L'hiver prochain, messieurs les critiques continueront à dire que je persiste dans ma désorientation. »

lundi 29 mai 2017

Paul Surtel (1893-1985)


Paul Surtel (1893-1985) 
 Les aubergines,1964
Collection Privée

 Que voit on ? Sur une table de jardin en fer sur laquelle une torchon fait office de nappe provisoire :  un plat en céramique contenant deux aubergines, deux autres aubergines étant tombées du plat sur la nappe.  Le couteau au premier plan est l'élément qui souligne sens la perspective (comme dans toutes les natures mortes) mais ici il a aussi un aspect  très pratique:  il va servir à découper les aubergines  légumes emblématiques de la cuisine provençale. Derriere les aubergines : une cruche à eau contenant un bouquet de fleurs de la garrigue. A l'arrière plan : un fragment de buffet provençal.   Nous sommes en Provence par une belle matinée d 'été. 

Rappel biographique :  Paul Surtel est un peintre et épistolier français, fils d'une famille de cafetiers  et restaurateurs installés dans la région parisienne, de père en fils.  Fernand Maillaud, le « bon maître », ami du père de Paul, peintre paysagiste, l'initie  très tôt à la peinture.  A partir de 1904,  Paul Surtel monte à Paris, le lycée Charlemagne, les Arts Décoratifs, et surtout « l’école buissonnière », les visites de musées et des expositions dans les galeries parisiennes. Il se prend alors de  passion pour Rembrandt et surtout Corot  (qui l'influença grandement).
Au moment de la Premiere  guerre  mondiale, il est enrôlé comme artilleur début 1917. De Seine et Marne en Lorraine, Belgique, Somme, il passe d’offensives en cantonnements. Alors il se laisse reprendre par la nature, dessine, laisse l’émotion guider sa main, le métier s’acquérant de lui-même à force d’attention et de travail.
Démobilisé à Hyères, Paul trouve une occupation de contremaître forestier dans les forêts du Var, et découvre la nature provençale qui va devenir la source de son œuvre et le fera connaitre comme " peintre régionaliste ", une étiquette assez péjorative à porter en France jusqu'à il y a encore très peu de temps.   En 1937, lors d’une de ses premières expositions à Oran (Algérie, à cette époque  département français) Paul Surtel rencontre Elia Duc, une jeune professeur de Mostaganem. Ils se marient en 1939.  Suivront 48 années de création passionnée, surtout à Peipin (Alpes de Haute Provence) où le couple s'installe. Ses tableaux rayonnent de tendresse, de légèreté, d’effusion, à travers une matière impalpable. Après deux ans dans le Quercy, puis trois à Orange, la famille se fixe en 1951 à Carpentras, dans le Vaucluse, où Elia est nommée professeur.
A partir des années 60, Paul Surtel ajoute aux paysages, natures mortes et portraits.

dimanche 28 mai 2017

Adrian Stokes (1902-1972) - Still Life Last Eleven n°10


Adrian Stokes (1902-1972)
Still Life Last Eleven n°10  
Tate

Que voit-on ?  Sur un plan non  défini, deux carafes et un verre semble émerger d'une brume bleutée. Dans cette nature morte encore plus que dans les autres du même peintre déjà présentées sur ce blog, la volonté est de rendre les frontières entres les objets aussi indistinctes et imprécises que possible.

Rappel biographique :  Adrian Stokes - à ne pas confondre avec son homonyme l'architecte Victorien Adrian Scott Strokes (1854-1935) - fut surtout célèbre comme auteur de livres et d'articles sur  Henry Moore (1898-1986), Ben Nicholson (1894-1982) et Barbara Hepworth (1903-1975), de même que  pour son érudition concernant la Renaissance italienne. Mais Adrian Strokes peignit aussi des paysages, des nu et des natures mortes se caractérisant par une monochromie qui rend toujours les sujets  indistincts les uns des autres. Un style qui rend ses toiles immédiatement identifiables.  Stokes a appris à peindre de façon autodidacte dans les années 1930, ne voulant pas se contenter d'être un critique d'art qui ne savait comment les peintres peignaient.  Il exposa ensuite à Londres dans les années 1950 et 1960, mais resta un artiste très confidentiel, seulement apprécié de l'intelligentsia britannique, sans jamais être célèbre hors des frontières du Royaume-Uni. Ayant suffisamment de moyens financiers pour ne pas avoir besoin de vendre son travail, il ne chercha jamais à le promouvoir auprès du grand public. Son écriture pictural est réputée " abstraite et psychanalytique ", plus en  rapport avec la perception de la forme qu'avec la description elle-même de la forme. Il fut un grand admirateur de la psychanalyste américaine Melanie Klein (1882-1960) dont la pensée influença beaucoup l'écriture de Stokes. A la fin de sa vie, voici ce que Stokes écrivait sur Turner, et qui d'un certaine manière pourrait s'appliquer à sa propre peinture qui en est - à bien des égards - très proche : " Il y a une longue histoire  "d'indistinction" des formes dans l'art de Turner, liée à ce que j'ai appelé une  "qualité enveloppante " qui ne concerne pas seulement le tableau lui-même mais aussi le rapport enveloppant du spectateur au tableau  ". Et en effet les peintures de Stokes s'appliquent à représenter des objets dont la substance est rendue indistincte et ce par l'usage de pinceaux cassés qui transmettent une lumière légère, dissolvant littéralement la distinction entre les formes et leur support. En 2001, la Tate de Londres a reçu le legs de huit peintures de Stokes (des natures mortes principalement) données par son ami et admirateur, le critique d'art David Sylvester (1924-2001).

samedi 27 mai 2017

Adriaen Coorte (1665–1707) - Still Life with Asparagus ans strawberries



Adriaen Coorte (1665-1707)
Still Life with Asparagus ans strawberries (1696)
National Gallery of Art,  Washington

Que voit-on ? Les asperges sont avec les coquillages les sujets qu'Adriaen Coorte a le plus peint.  Un  autre variation sur ce même thème existe avec des groseilles, la plus singulière version étant sans doute celle conservée à Amsterdam où l'on voit une botte d'asperges seule, dont chaque tige semble faite d'albâtre ou d'ivoire et dont celle qui ne sont pas arrivées à maturité sont présentées à l'envers. 
ici, la blancheur des tiges constrate avec le rouge des framboises conservées dans un récipient en terre cuite.  

Rappel biographique : le peintre hollandais Adriaen Coorte est spécialisé exclusivement dans la peinture de natures mortes. Au contraire de la tendance de l'époque en Europe du Nord qui déployait argenterie et cristaux dans les natures mortes monumentales, Coorte a peint des natures mortes de petits formats et au sujets très intimistes pour ne pas dire minimalistes. 
On sait très peu de sa vie, si ce n'est qu'ill fut l'élève de Melchior d'Hondecoeter vers 1680 à Amsterdam et qu'il a installé son petit atelier de natures mortes à Middelburg, en 1683. Il peignait souvent sur du papier (quelquefois au dos de simples feuilles de compte) qu'il collait ou que l'on colla par la suite sur un panneau de bois ou sur un canevas pour mieux les préserver. 
Environ 80 oeuvres signées par lui ont été cataloguées, et presque toutes suivent la même composition à savoir de très petites quantités de fruits, de légumes ou coquillages, voir même quelquefois un seul fruit ou légume (comme ici) , posés le rebord d'une dalle de pierre, éclairé par le haut, avec le fond sombre typique de natures mortes du début du 17e siècle.
Les fraises des bois et les asperges sont ses motifs les plus fréquents. Les premières sont parfois représentées soit dans le même pot en terre cuite, soit dans de jolis bols bleus et blancs en porcelaine Wan-Li importés de Chine par la Compagnie des Indes. Quelques rares papillons brisent la noirceur de l'arrière-plan, ajoutant une tâche de couleur à ces compositions d'une magnifique austérité. Le fait qu'elle soient peintes sur du papier ajoutent à leur fragilité et à leur délicatesse infinie.  
Coorte ne fut pas très connu de ses contemporains en dehors de la petite ville de Middelburg et, comme Vermeer un siècle avant, il est totalement tombé  dans l'oubli  jusqu'à ce que les années 1950, l'historien d'art hollandais Laurens J. Bol, publie une première monographie suivie en 1977 d'un catalogue raisonné de l'oeuvre de  Coorte.   

vendredi 26 mai 2017

Blaise-Alexandre Desgoffe (1830-1901)


Blaise-Alexandre Desgoffe (1830-1901) 
Nature morte aux vases d'agate et de cristal de roche
Private collection, USA

Que voit-on ? Comme souvent chez ce peintre des objets précieux et rares, on trouve ici  une accumulation de pièces d'un grand luxe, ordonnées comme dans la vitrine d'un antiquaire, et peintes avec une touche un rien embuée et presque impressionniste. L'arrière plan est occupé par un riche miroir baroque doré et dégoulinant d'angelots tapis dans l'ombre, alors que la vedette - sur un piédestal recouvert de damas rouge et or et de dentelles de Venise - est occupé par un vase d'agate serti de bronze et de pierreries et par un vase de cristal de roche sculpté de motifs antiques. Reflets parfaits, textures réalistes à souhait, tout est réuni pour que l'on tombe en arrêt devant cette toile, ce qui fut sans doute le cas pour les contemporains de ce peintre au succès considérable. Au premier plan : un fourreau et une crosse d'épée en bronze finement ciselés donne un mouvement bienvenu à cette composition très spectaculaire quoiqu'un peu statique.

Rappel biographique : le peintre français Blaise-Alexandre Desgoffe a fait ses études de peinture dans l'atelier d'Hippolyte Flandrin à l'Ecole des Beaux-arts de Paris et a reçu les conseils de William Bouguerreau. Après une formation en peinture d'histoire, il se tourne vers la peinture de natures mortes dans laquelle il développe une grande virtuosité rappelant celle des maîtres hollandais du 17e siècle. Il expose au  Salon de Paris de 1857 à 1882. Il remporte une médaille de 3e classe en 1861 et une médaille de 2e classe en 1863. A l'exposition Universelle de 1867, il expose Un coin de cabinet de Louis XVI.  Le succès de sa carrière de peintre de natures mortes a été considérable de son vivant, malgré des problèmes relationnels avec ses contemporains, attisés par un ego démesuré et sa fâcheuse tendance à se prendre pour un génie. Très académique et spectaculaire, sa peinture qui a beaucoup influencé des peintres comme William Meritt-Chase est totalement tombée dans l'oubli en Europe au 20e siècle, même si elle restée assez célèbre aux Etats-Unis à la même période.

jeudi 25 mai 2017

Andy Warhol (1928-1987) - Still life polaroid exhibition 1


Andy Warhol (1928-1987) 
Still-life polaroid exhibition 1 (1977-1983)
Private collection 

Que voit- on ? La première des natures mortes que Warhol réalisa sur Polaroïd entre 1977 et 1983. Plusieurs polaroids de cette célèbre série seront postés dans ce blog, ce premier étant quasiment un des seuls à comporter des fruits, en l'occurrence 6 bananes alignées en rang d'oignons... si on peut dire !  Le Polaroïd était une technique photographique des années 1970-80 qui garantissait à tout un chacun de voir apparaitre presque immédiatement le résultat de la photo que l'on venait de prendre, sans avoir à attendre de développement de la pellicule par un laboratoire. Au fil des décennies et après avoir disparue, cette technique a fini par migrer vers un genre photographique à part entière, pour ne pas dire vers une forme d'art spécifique. Assez ironiquement, ce medium très commun, très bon marché et  - faut il le rappeler -  jetable,  est devenu un objet de collection parmi les plus précieux. Dans le cas de Warhol qui n'hésitait jamais à reproduire ses oeuvres à des milliers d'exemplaires, le Polaroïd est même devenue la seule garantie de posséder une oeuvre unique de cet artiste.  Seul problème : la composition chimique des Polaroid n'était pas destinée à durer dans le temps, c'est un medium qui se dégrade très vite et exige des conditions de conservation draconiennes... tout en sachant d'ailleurs q'un jour ou l'autre, toute impression pourra disparaitre de sa surface, ce qui dans le cas d'une nature morte est  une façon singulière de rejouer le Memento mori.

Rappel biographique : On ne présente plus l'artiste américain Andy Warhol, pape du Pop art, (Pope of the pop), sujet de multiples expositions, livres, et films avant et depuis sa mort... Warhol est généralement reconnu comme l'un des très grands artistes du  20e siècle. Avec lui la nature morte peut prendre toutes les formes humoristiques imaginables (et même inimaginables!) des célèbres boîtes de Campbell soup à des oeufs en forme de pastilles colorées (déjà publiés dans ce blog), en passant par des trèfles à 4 feuilles traitées façon capucines et vendus en rouleaux de papier peint. Warhol iconoclaste adoré de son vivant par les grands de ce monde, les élites intellectuelles, les stars d'Hollywood et les riches aristocrates anglos saxons qu'il aimait malmené, était en fait un puritain, très religieux et assez " coincé "...
Tout commence pour lui au début des années 1960, lorsque publicitaire déjà  reconnu, il utilise dans ses dessins une technique directe sur du papier hydrofuge et repasse les contours avec de l'encre encore humide sur des feuilles de papier absorbant, en adoptant le vieux principe du buvard. Bien qu'à cette époque, beaucoup d'artistes soient illustrateurs publicitaires pour des entreprises, tous le font discrètement. Pour Warhol, c'est le contraire : il est tellement connu en tant que publicitaire que son travail artistique n'est pas pris au sérieux. Il présente dans une galerie quelques-unes de ses œuvres, mais c'est un échec. Reconsidérant alors son travail alimentaire et son travail de peintre, plutôt que de les opposer, il pense à les réunir. Il a l'idée d'élever les images de la culture populaire au rang de l'art élitiste, rejoignant ainsi les artistes du pop art, mouvement lancé à Londres au milieu des années 1950 par Richard Hamilton et Eduardo Paolozzi, qui l'expérimentent indépendamment les uns des autres. Si Roy Lichtenstein et Jasper Johns en sont les pionniers, Andy Warhol  en sera véritablement le pape.
En 1963, il adopte la technique qu'il utilisera pour ses œuvres les plus célèbres : la photographie sérigraphiée sur toile. 
Les photographies simplifiées en noir et blanc, sans gris, sont imprimées en sérigraphie sur la toile peinte de grands aplats de couleurs. Le motif est parfois reproduit plusieurs fois sur la toile, comme un motif de papier peint. C'est le stéréotype du pop art.
Ses motifs de prédilection sont des noms célèbres de marques déposées, le symbole du dollar, les visages de célébrités...  
Le thème des Comics, qui avait d'abord intéressé l'artiste, était déjà largement exploité  par le peintre Roy Lichtenstein qui en avait fait sa marque de fabrique. Jasper Johns avait choisi la typographie. Pour se démarquer, Warhol comprit qu'il devait lui aussi trouver sa marque. Ses amis lui ayant conseillé de peindre ce qu'il aimait le plus, il choisit de représenter les conserves de Campbell's Soup, pour sa première exposition majeure. Les boîtes de Campbell's Soup ouvertes ou neuves, rouillées, aux étiquettes déchirées, uniques ou multipliées, en séries, en damiers, seront le thème récurrent de Warhol. Pour lui, l'image, son pouvoir au sein de la société de consommation est en lien avec la mort. La répétition de la figure se rapporte souvent à son extinction. Le choix des sujets est en rapport avec cette obsession de la mort, y compris pour les toiles célèbres sérigraphiées de Marilyn Monroe (peintes après sa mort, notamment les Diptyque Marylin) ou de Liz Taylor (peinte alors que l'actrice était gravement malade), icônes reproductibles à l'infini qui deviennent des images de consommation.
Dans les dernières années de son œuvre, Warhol presque peintre officiel, appliquera son style à de nombreux portraits de commande, tout en continuant à expérimenter d'autres techniques picturales dans ses séries ShadowsOxydation paintings, et ses reprises de toiles de Botticelli ou de Léonard de Vinci.

mercredi 24 mai 2017

André Derain (1880-1954)


André Derain (1880-1954)
Nature morte avec citrouille 
Collection Privée

 Que voit-on ? Une composition complexe tout en clair-obscur et couleurs vives dont la citrouille qui donne son titre à la toile est bien le centre. Cette nature morte, composée sur deux étages, à la façon de natures mortes de l'Antiquité Romaine, prend appui pour son premier plan sur un banc de bois de type banc de monastère et, pour le second plan sur la table longue devant laquelle il permet de s'asseoir. Les deux plans sont recouverts de linges dont les pliures sont décrites avec une précision presque maniaque : il s'agit d'une serviette dépliée sur la partie gauche du banc et d'une nappe comme symétriquement dépliée sur la partie droite de la table. L'oeil attiré par ce jeu de linges en oublierait presque "les" natures mortes elles-mêmes réunissant  tous les objets classiques des natures mortes des ages d'or à la fois hollandais, espagnol et français ! Reflets, textures, jeux de lumières et de couleurs c'est, à n'en pas douter, un hommage appuyé de Derain à tous ces prédécesseurs dans le domaine.

Rappel biographique : Le peintre français André Derain est l'un des fondateurs du fauvisme. Peintre de figures, de portraits, de nus, de paysages, de marines, de natures mortes, il emploie diverses techniques : huile, gouaches, aquarelles, pastels. Il est également peintre de décors de théâtre, sculpteur, graveur et illustrateur.
Pendant l'occupation allemande de la France, Derain est courtisé par les Nazis comme symbole prestigieux de la culture française. Il accepte une invitation pour une visite officielle en Allemagne en 1941, avec, notamment, son ami Maurice de Vlaminck, Kees van Dongen ou le sculpteur Paul Belmondo. Derain est traité de collaborateur et ostracisé après la Libération. Après la guerre, il renonce aux présentations publiques de ses œuvres et finit sa vie dans une solitude volontaire.
Son œuvre est parfois considérée comme un revirement vers la tradition après un engagement dans les avant-gardes mais elle témoigne fortement des préoccupations des artistes de son époque, dont beaucoup, à l'instar de Maurice De Vlaminck ou Félix Valotton suivent ce même itinéraire, qualifié par les historiens de l'art de « retour à l'ordre », auquel même Picasso n'échappe d'ailleurs pas à la fin des années 1910, durant une courte période. L'œuvre de Derain est essentiellement picturale, mais il a également signé les décors et les costumes de nombreux ballets, illustré une trentaine de livres, il est également connu comme sculpteur. Une grande partie de son œuvre (80 peintures, 77 sculptures, des dessins, mais aussi des objets d'art primitif lui ayant appartenu), précédemment dans la collection Pierre et Denise Lévy, est présentée au musée d'art moderne de Troyes. Quelques de ces toiles sont aussi conservées  dans les plus prestigieux musées de la planète (le Metropolitan Museum of Art de New York,  le Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris, le Museo Rhyssen-Bornemisza de Madrid, la Royal Gallery de Londres, l'Australian National Gallery, le Bunkamura Museum of Art à Tokyo...)

mardi 23 mai 2017

Pierre Tal Coat (1905-1985) - Nature morte sur la table





Pierre Tal-Coat (1905-1985)
 Nature morte sur la table
 Collection Privée

Que voit on ? Une nature morte foisonnante, concentrée dans l'espace rouge et jaune de la table en bas de la composition. On y trouve au centre : un bougeoir en boules de cuivre ou de verre dont la flamme est repeinte de façon stylisée sur une toile qui se trouve derrière lui ; un vase bleu ; une bouteille brisée ; une vanité (à l'extrême droite) esquissée puis effacée dans un repentir qui n'en est pas tout à fait un ! ; une pierre-ponce (!) et dans le fond, à droite, une fenêtre qui a des allures d'oreiller à moins que ce ne soit l'inverse ! Le peintre joue ici avec les formes en brouillant volontairement les grilles de lecture avec cette poésie et cet humour (ultime forme du désespoir !) qui furent sa marque de fabrique.

Rappel biographique : Le peintre, graveur et illustrateur français Pierre Tal Coat (pseudonyme de Pierre Jacob pour éviter l'homonymie avec Max Jacob quimpérois comme lui), apparenté au mouvement de l'École de Paris Avec les artistes de ce mouvement, il exposa régulièrement à  la Galerie de France (de 1943 а 1965), dans les  galeries Maeght (de 1954 а 1974), Benador (de 1970 à 1980) puis à  la galerie H-Met , la galerie Clivages. En 1956, seize de ses peintures furent présentées à la Biennale de Venise. Aux côtés de Joan Miro et de Raoul Ubac, il collabore en 1963 aux réalisations pour la Fondation Maeght de Saint-Paul de Vence d'une mosaïque pour le mur d'entrée.
En 1968 le Grand Prix national des arts.
Une grande exposition rétrospective lui fut consacrée au Grand Palais à Paris en 1976.
А partir de 1961, Tal Coat s'installа  à la Chartreuse de Dormont  près de Vernon (Eure), où il finira sa vie. Tal Coat a illustré de nombreux livres d'art avec des gouaches, dessins, pointes sèches ou aquatintes, notamment de nombreux ouvrages d'André du Bouchet, Pierre Schneider, Pierre Torreilles, Philippe Jaccottet, Claude Esteban, Maurice Blanchot, Pierre Lecuire, Jacques Chessex...
Tal Coat a peint une série importante de natures mortes, toutes réalisées en 1942, en pleine guerre, alors qu'il se trouvait réfugié à Aix-en-Provence.

lundi 22 mai 2017

Nikolai Matveevich Pozdneev (1930-1978)


Nikolai Matveevich Pozdneev (1930-1978) 
Still life in the grass (1964) 
Private collection 

 Que voit on ? Un déjeuner sur l'herbe fraîche. Un papier journal déplié en guise de nappe sur lequel on a posé une demi-miche de pain, quelques légumes et leurs fanes, une petite marmite pleine de pommes de terre. Une seule assiette pour ce déjeuner solitaire, qui fut sans doute celui d'un ouvrier agricole dans l'Union Soviétique des années soixante où vivait ce peintre sensible et poétique, éminent représentant de l'Ecole de Leningrad.

Rappel biographique :  Nikolai Matveevich Pozdneev (Николай Матвеевич Позднеев) était un peintre rustique soviétique, vivant et travaillant à Leningrad (actuel St Petersburg), membre de l'Union des Artistes, considéré comme un des principaux représentants de la célèbre Ecole de peinture Leningrad. Dans les années 1960 et 1970, Nikolai Pozdneev, comme beaucoup d'autres artistes russes  peignant des scènes de la vie quotidienne, des paysages et des natures mortes, divise sa production artistique en deux saisons : une saison citadine qui va de la fin de l'automne au début du printemps et une saison campagnarde d'avril à novembre. Vivant et travaillant comme artiste officiel du régime à l' "Academichka" (l'Académie), Nikolai Pozdneev a su néanmoins exprimer - avec les immenses  contraintes de censure qui étaient les siennes - une sensibilité et une poésie qui rendent chacune de ses toiles, même les plus banales, immédiatement identifiables.  

dimanche 21 mai 2017

Odilon Redon (1840-1916) - Fruits et Fleurs

http://astilllifecollection.blogspot.com

Odilon Redon (1840-1916) 
Fruits et Fleurs
Collection privée

Que voit-on ? Une explosion de couleurs sur un fond clair. Des fleurs qui ressemblent à des fruits et des fruits qui ressemblent à des fleurs. Sous l'apparente simplicité de cette composition, une grande attention à l'association des couleurs entre elles, de nombreux "repentir" changeant la couleur de telle pétale ou de telle partie du fond à mesure de l'achèvement, pour aboutir finalement à une exceptionnelle luminosité.

Rappel biographique : le peintre français Odilon Redon (né Bertrand-Jean Redon) est un peintre rattaché au mouvement symboliste et coloriste de la fin du 19e siècle. Son art explore les aspects de la pensée, l'aspect sombre et ésotérique de l'âme humaine, empreinte des mécanismes du rêve. Il a peint assez peu de natures mortes, La Coquille, exécutée au pastel en 1912 et présentée aussi sur ce blog, figure au nombre de ses plus célèbres toiles. 

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2017 - A Still Life Collection 

Un blog de Francis Rousseau

samedi 20 mai 2017

Nicolas de Staël (1914-1955) - Nature morte au verre


Nicolas de Staël (1914-1955)
Nature morte au verre, 1954
Collection Privée.

Que voit on ?  Posés sur un entablement noir qui occupe le quart de l'espace laissé vaquant par le fond blanc : à gauche, un cendrier vert ; à droite, un verre noir qui donne son titre au tableau. Une des compositions les moins connues et les plus puissantes de De Staël, réalisée un an avant sa mort, avec 3 couleurs : blanc, noir et vert.

Rappel biographique : Le peintre français d'origine russe Nicolas de Staël, né baron Nicolaï Vladimirovitch Staël von Holstein, est issu d'une branche cadette de la famille de Staël-Holstein. Plus d'un demi siècle après sa mort, il reste l'un des peintres les plus marquants du 20e siècle posant un problème aux historiens de l'art qui ne savent pas dans quelle catégorie le classer, ce qui doit le réjouir post mortem, lui qui détestait les catégories et les courants.
La réinvention de la figuration opérée par Staël a été mal comprise alors qu'elle anticipait d'une vingtaine d'année l'évolution générale de l'art. Il a « retrouvé le visible sans renoncer aux possibilités expressives et à la liberté d'action qui définissent la peinture contemporaine»  alors que Paris perd sa place de capitale des arts, dès les années 1960, sous l'effet du marché de l'art et de la surenchère : " on y est devenu incapable de discerner le pastiche de l'original " selon Umberto Eco.
Selon Marcelin Pleynet et Michel Seuphor : « ...il faut tenir compte de Nicolas de Staël, vu et revu souvent avec et travers l'avant-garde américaine de années cinquante. Ces nouveaux mouvements d'abstraction suivent le cheminement de Staël, délaissant la peinture gestuelle pour une peinture brossée, voir maçonnée ».
Peu exposé de son vivant, son œuvre a donné lieu à de nombreuses manifestations posthumes qui ont confirmé sa stature sur le plan international. " Staël fut le plus puissant créateur de sa génération dans l'École de Paris de l'après-guerre, sur laquelle il a exercé une forte influence Il a été le premier à dépasser l'antinomie  abstraction-figuration ".
Nicolas de Staël meurt à 41 ans en se jetant de la terrasse de l'immeuble où il avait son logement et un de ses ateliers à Antibes. L'ensemble de son oeuvre s'étend sur 15 années. Il a peint, à partir de 1952, plusieurs natures mortes dont quelques unes sont aujourd'hui conservées et exposées au Musée Picasso d'Antibes à quelques pas de son ancien atelier. Plusieurs sont présentées sur ce blog.

2017 - A Still Life Collection 
Un blog de Francis Rousseau, #AStillLifeCollection, #NaturesMortes 

vendredi 19 mai 2017

N. L. Peschier (? -1661)


N. L. Peschier (? -1661) 
Vanitas 1660 
Philadelphia museum of Art, USA 

N. L. Peschier est un peintre franco-néerlandais assez mystérieux dont on ignore le prénom exact et la date de naissance. On sait qu'il fut actif pendant une brève période autour de 1659-1661 à Amsterdam et à Leyde. Peintre spécialisé dans les natures mortes, et en particulier les Vanités, on ne connaît ce peintre que par sa signature sur ses tableaux. Différents symboles reviennent dans ses œuvres, comme dans la plupart des Vanités qui insistent sur la précarité de l'existence humaine. Le sablier et la chandelle qui symbolisent le passage du temps, le crâne qui renvoie à la mort, des sacs d'argent qui insistent sur le caractère éphémère de la richesse et du pouvoir, le violon et des partitions qui font allusion aux plaisirs à travers les arts et la musique, des documents chiffonnés qui évoquent la fragilité des choses du monde.

jeudi 18 mai 2017

Olivier Debré (1920-1999)



Olivier Debré (1920-1999)
Nature-Morte, 1958
Collection privée

Que voit on ? C'est l'ultime degré d'interprétation de la nature morte en peinture : l'abstraction. Pas celle que l'on trouve déjà dans certaines natures mortes de Giorgio Morandi ou de Nicolas de Staël - chez lesquels les objets qui composent la nature morte sont souvent nommés -  mais une abstraction totale, revendiquée, assumée. Même si tout à coup le jeu des interprétations, des transpositions, nous est confisqué par la nature même de la nature (abstraite), toute forme n'a pas disparu de la composition et l'oeil (à qui le peintre a tout de même pris le soin d'indiquer qu'il s'agissait d'une nature morte) ne peut s'empêcher de recomposer, presque mécaniquement, ici une bouteille, là un vase, voir une orange ou deux prunes...

Rappel biographique :  Le peintre français Olivier Debré est un représentant majeur du courant de  l’Abstraction lyrique. Fils du professeur Robert Debré, le frère de Michel Debré (Premier ministre du Général de Gaulle) et l'oncle de Bernard Debré et de Jean-Louis Debré, il fut le seul artiste d'une famille qui compte surtout des hommes politiques et des médecins. En juin 1937, il subit un choc en voyant, exposé au Pavillon de l’Espagne de l’Exposition internationale à Paris, le Guernica de Picasso. Georges Aubry, dont la galerie est située rue de Seine à Paris, l'encourage en l'exposant le premier. Il est remarqué par Dunoyer de Segonzac et Picasso qu'il rencontrera en 1941, ce dernier l’invitant dans son atelier  rue des Grands-Augustins pendant l’hiver 1942-1943.
Durant la Seconde Guerre mondiale, son art est marqué par l'expression graphique. Le dessin lui permet de traduire toute l'horreur de la guerre : Le Mort de Dachau, Le Sourire sadique du Nazi, Le Mort et son âme. En 1946, il installe un atelier à Cachan, il y peint une toile de 8 m de long : La Vérité et la Justice poursuivant le crime.
En 1949, il présente sa première exposition personnelle à la galerie Bing, à Paris, marchand de Soutine et de Modigliani. А l'automne, Olivier Debré installe un second atelier rue de Saint Simon à Paris et  fait la connaissance de ses grands aînés:  Hans Hartung, Gérard Schneider, Serge Poliakoff, Maria Elena Vieira da Silva. Il réalise ses premiers Signes-personnages.
Dans les années 1950, privilégiant la matière et les couleurs sourdes.
1953 correspond à une période charnière dans son œuvre où il délaisse les signes-personnages pour les signes-paysages. C'est à cette époque qu'il prend conscience des possibilités multiples offertes par la technique de la lithographie qu'il n'a jamais cessé de pratiquer. En 1956, Michel Warren organise sa première exposition individuelle à Paris. L'année suivante, la seconde exposition chez Michel Warren le fait figurer « désormais en bonne place parmi les chefs de file de l'Ecole de Paris », écrit John Prossot dans Apollo dont la couverture reproduit le tableau exposé. Après un voyage en Espagne, il expose, en 1959, а la Phillips Gallery а Washington et rencontre Rothko.
Sa première exposition personnelle à Oslo se tient à la galerie Haaken A.Christensen en 1966. Il voyagera et peindra en Norvège jusqu'à la fin de sa vie.  En 1967, il participe à l'exposition internationale de Montréal avec une gigantesque peinture Signe d'homme, pour le pavillon français. En 1975-1976, il fait partie, avec Pierre Alechinsky, Hans Hartung, Roberto Matta, Zoran Music, Edouard Pignon et Pierre Soulages, de l'exposition itinérante en France Trente créateurs organisée par André Parinaud.
De 1980 а 1985, Olivier Debré est nommé professeur, chef d'atelier de peinture murale а l'Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris. La consécration du peintre est également marquée par l'inauguration d'une salle Olivier Debré au Musée des beaux-arts de Tours en 1992.  Le 17 mars 1999, quelques mois avant sa mort en juin, il est élu membre de l'Institut de France, à l'Académie des beaux-arts, au fauteuil précédemment occupé par le peintre Georges Cheyssac.
En 2015, le CCC - Centre de Création Contemporaine de Tours est devenu le "Centre de Création contemporaine Olivier Debré". Il s'implante en 2016 dans un nouveau bâtiment actuellement en construction sur le site du jardin François 1er. Le lieu ne sera pas un musée consacré à Olivier Debré mais un centre d'art qui fera vivre l’œuvre du peintre en la mettant en résonance avec la création artistique contemporaine.

mercredi 17 mai 2017

Jacob van Hulsdonck (1582-1647




Jacob van Hulsdonck (1582-1647)
Still Life with plums
Private collection

Que voit-on ?  Un chef d'oeuvre à n'en pas douter !  Sur un entablement de bois, la plus simple, la plus parfaite et sans doute la plus moderne des natures mortes de l'âge d'or hollandais que l'on puisse imaginer. Quelques prunes de diverses couleurs servies (avec leurs reflets) dans un plat en étain... mais surtout une variation sur les coloris : toute la gamme des rouges, du rose le plus tendre au prune le plus profond, et  toute la gamme des textures (satiné des prunes, brillance des cerises), exécutées avec une économie de moyens qui laisse d'autant plus songeur que ce peintre n'est pas, habituellement, à proprement parlé, un adepte de la sobriété !

Rappel biographique : Le peintre flamand Jacob van Hulsdonck, contemporain de  Rubens, se forme à la nature morte à rejoint à Middlegourg auprès d'Ambrosius Bosschaert, célèbre pour ses natures mortes à sujets floraux. De retour à Anvers, il entre dans la Guilde des peintres en 1608 et connaît, à la tête d'un atelier, une brillante carrière jusqu'à sa mort. Il a réalisé des natures mortes de fleurs, de fruits et de déjeuner.  Il glisse souvent dans ses natures mortes des éléments symboliques et/ou mystérieux.

mardi 16 mai 2017

Henri Matisse (1869-1954) - Intérieur aux aubergines


Henri Matisse (1869-1954)
Intérieur aux aubergines, 1911
 Musée des beaux-arts de Grenoble

Que voit on ?  Dans un intérieur très surchargé en impressions florales et arabesques, il pourrait paraitre bien difficile de dénicher ces trois petites aubergines qui donnent leur nom à la toile. Pourtant elles apparaissent immédiatement. Au beau milieu (et en plein centre surtout!) de cette symphonie explosive de couleurs et de formes, c'est à peine si les deux pommes vertes, la statuette et le vase posé sur la même table viennent distraire l'attention. Puis on remarque un miroir, posé au sol sur la gauche du cadre, un peu en retrait de la cheminée. Dans le miroir se reflète - ou plutôt se dédouble - les aubergines et toute la scène centrale de laquelle cependant les pommes vertes ont disparu ! Sur la cheminé elle-même : une autre nature morte, composée d'un modeste bouquet de fleurettes dans un verre (vert) et d'une statuette africaine figée dans un mouvement de danse.

Rappel Biographique : Le peintre français Henri Matisse, chef de file du Fauvisme figure majeure du 20e siècle, a peint tout au long de sa vie, un très grand nombre de natures mortes dans des styles aussi différents que les périodes qu'il a traversées. Il aimait particulièrement ce genre à tel point qu'une de ses toutes premières peintures connues, actuellement conservée au Musée Malraux du Havre (France) est une nature morte, Nature morte au pichet peinte en 1896-97. Les animaux marins, les poissons et les mollusques dont les huitres, fréquents chez Matisse, sont toujours des signes de son évolution vers une peinture simplifiée et synthétique. Son maître, Gustave Moreau lui avait dit avec clairvoyance et d’un léger ton de reproche : « Vous allez simplifier la peinture… » ou encore, « Vous n’allez pas simplifier la peinture à ce point-là, la réduire à ça. La peinture n’existerait plus… ». Il a aussi beaucoup regardé les estampes d’Hiroshige ou d’Hokusaï, dont on retrouve souvent  l’influence chez Matisse dès lors qu'il s 'agit de peindre la mer et les poissons.   

lundi 15 mai 2017

Henri-Horace Roland De La Porte (1724-1793) - Vase de Lapis, Sphère et Musette



Henri-Horace Roland De La Porte (1724-1793) Vase de Lapis, Sphère et Musette, 1763 Musée du Louvre Paris


Henri-Horace Roland De La Porte (1724-1793)
Vase de Lapis, Sphère et Musette, 1763
Musée du Louvre Paris

Que voit-on ? Une nature morte aux objets précieux, ce qui n'est pas fréquent chez ce peintre coutumier des objets de cuisine et des instruments de musique. Cette pièce qui fut présentée comme une pièce de réception d'Henri-Horace Roland De La Porte à l'Académie regroupe toutes les caractéristiques du genre, y compris le reflet de la fenêtre dans la brillance du Lapis. On sait peu de choses de ce tableau (qui mériterait une bonne restauration) sinon qu'il se retrouva dans les collections du Louvre à la suite d'une saisie datant de la Révolution française.

Rappel biographique : Le peintre français Henri-Horace Roland de la Porte fut un élève de Jean-Baptiste OudrySpécialisé dans les natures mortes  animalières, natures mortes avec fruits mais aussi  trompe l'oeil, De La Porte est reçu à l’Académie royale de peinture et de sculpture avec Vase de lapis, sphère et instruments de musique comme morceau de réception. Peignant de nombreuses natures mortes aux instruments de musique, il expose très fréquemment au Salon de 1761 à 1789. La proximité de son style avec celui de Chardin a été souvent une source d’erreurs d’attribution comme précisément pour cette nature morte a la vielle encore quelquefois attribué aujourd'hui à Chardin.  Les deux peintres sont pourtant assez différents et leur touche n'a rien de commun. 
En 1765, Diderot écrit, excédé par ce rapprochement permanent entre De La Porte et Chardin  : 
« Dites à ceux qui passent devant Roland de La Porte sans s’arrêter, qu’ils n’ont pas le droit de regarder Chardin. Ce n’est pourtant ni la touche, ni la vigueur, ni la vérité, ni l’harmonie de Chardin ; c’est tout contre, c’est-à-dire à mille lieues et à mille ans. C’est cette petite distance imperceptible, qu’on sent et qu’on ne franchit point. Travaillez, étudiez, soignez, effacez, recommencez, peines perdues. La nature a dit : Tu iras là, jusque là, et pas plus loin que là. Il est plus aisé de passer du pont Notre Dame à Roland de La Porte, que de Roland de La Porte à Chardin. » 

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Un blog de Francis Rousseau

dimanche 14 mai 2017

Paul Rebeyrolle (1926-2005) - La Truite



Paul Rebeyrolle (1926-2005)
La Truite, 1953
Musée de l'abbaye Saint Claude, France

Que voit on ? Une truite... fraichement pêchée ! qui ne peut plus s'ébattre dans le courant de la rivière et qui git de tout son long sur une table anonyme, tel un trophée.

Rappel biographique :  Le peintre français Paul Rebeyrolle fut aussi lithographe et sculpteur. Rattaché au courant de la Nouvelle figuration, on le définissait volontiers comme expressionniste et matiériste. Son œuvre, immense, toujours figurative, est marquée par la violence, la rage, la révolte face à l'oppression ou l'engagement politique. Elle est ponctuée de tableaux animaliers et paysagers, ainsi que de tableaux employant des matières collées sur la toile (terre, crin, ferraille...) et de quelques natures mortes qui n'en portent cependant jamais clairement le titre. 
Peu médiatisée de son vivant, méconnue du grand public ainsi que de certaines institutions, cette œuvre a néanmoins été appréciée par des personnalités tels que  Jean-Paul Sartre ou Michel Foucault ainsi que par certains collectionneurs, dont François Pinault.
L'enfance de Paul Rebeyrolle fut marquée par une tuberculose osseuse, l'obligeant à de longs moments d'immobilité. Il étudie à Limoges avant de rejoindre Paris à la Libération. Il découvre alors les peintres contemporains ainsi que la peinture classique au musée du Louvre. Il est un acteur engagé du Manifeste de l'homme témoin qui, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, prône autour du critique d'art Jean Bouret un retour au réalisme contre les tendances de l'art contemporain. Il participe ainsi le 21 juin 1948 à la Galerie du Bac à l'exposition de « L'homme témoin » (avec Bernard Lorjou, Yvonne Mottet, Michel Thompson, Bernard Buffet  et Michel de Gallard). Ce groupe de L'homme témoin sera fondateur du Mouvement de la Jeune Peinture.
En 1949, Paul Rebeyrolle fut même  à l'origine du « Salon de la Jeune Peinture » dont la première édition se tint le 26 janvier 1950 à la Galerie des beaux-arts avec Denys Chevalier, Pierre Descargues, Philippe Cara Costea et Gaëtan de Rosnay,
Membre du parti communiste français à partir de 1953, Rebeyrolle rompt avec ce dernier en 1956 lors de l'invasion russe en Hongrie et du fait de la duplicité du Parti face à la guerre d'Algérie.
À cette occasion, il peint un grand tableau intitulé À bientôt j'espère.
En 1959, à 33 ans, il exécute un grand tableau qu'il intitule Planchemouton, commandé par le comité de la première Biennale de Paris, pour orner l'escalier du Palais des Beaux-arts. En 1963, il quitte Paris et s'installe à la campagne pour y vivre et y travailler, d'abord dans l'Aube puis en Côte d'Or ou il restera jusqu'à sa mort en 2000. Plusieurs retrospectives lui ont été consacrée dans sa carrière dont une en 1979 au Grand Palais (Paris), une en  2000 à la  Fondation Maeght (Saint-Paul-de-Vence),
et une 2015, Rebeyrolle vivant ! - 60 ans d'une oeuvre essentielle », à Espace Rebeyrolle (Eymoutiers).

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samedi 13 mai 2017

Giorgio de Chirico (1888-1978) - Vita silente con frutta

Giorgio de Chirico (1888-1978) Vita silente con frutta, c. 1964 Private collection, USA


Giorgio de Chirico (1888-1978)
Vita silente con frutta, c. 1964
Private collection, USA

Que voit-on ? Un amoncellement de fruits présentés au premier plan d'un paysage théâtralement mis en scène comme un décor de théâtre. Pommes, poires, grenades et raisins (dont certains ressemblent étrangement à des olives) ont pour point commun d'être gâtés par la grêle ou/et les vers. Une interprétation du Tempus fugit et un Memento mori au sens premier. D'une façon générale, c'est le thème central chez ce peintre dont la peinture qualifiée d'« oraculaire » s'applique à dire à la fois l’horreur devant la fuite des heures et la revanche de l’espace contre  « ce minotaure que les hommes appellent le Temps et qu’ils représentent sous l’aspect d’un grand vieillard desséché, assis d’un air pensif entre une faux et une clepsydre ». La vie finit cependant cependant toujours  par se réconcilier avec l’éternité, ne serait-ce que dans l’« éternité d’un moment ».

Rappel Biographique : Giorgio De Chirico est un peintre, sculpteur et écrivain italien  né en grève et dont les œuvres, unanimement admirées des surréalistes jusqu'en 1925, ont ensuite été rejetées tout aussi unanimement après. Son patron était l'éditeur Emilio Bestetti. On distingue généralement trois grandes périodes dans l'oeuvre de Chirico :
- les années 1910, dont les œuvres dites « métaphysiques » l'ont consacré comme symbole de la modernité,
- les années 1920-1930, période romantico-baroque, au cours de laquelle De Chirico revient sur des positions qu'il avait précédemment dénoncées,
- les années après 1940, qui voient le retour à une « néo-métaphysique » où se multiplient les répliques et les copies.
La rupture définitive avec les surréalistes intervient en 1928. En réponse à sa nouvelle exposition organisée par Paul Guillaume, les surréalistes organisent une contre-exposition à laquelle ils donnent pour titre Ci-gît Giorgio De Chirico. Dans un compte rendu de cette exposition, Raymond Queneau conclut « qu'il est inutile de s'attarder derrière ce grand peintre (...) Une barbe lui a poussé au front, une sale vieille barbe de renégat ». Cinquante ans plus tard, De Chirico répondra : « J'aurais préféré qu'on s'occupe de moi d'une façon plus intelligente. Mais je ne peux rien faire contre. »
La polémique n'empêche pas De Chirico de poursuivre son œuvre dans une voie plus académique mais aussi plus rémunératrice. Il s'entoure d'aides pour reproduire ses propres tableaux et investir ainsi les marchés européen et américain de l'Art, déclinant à l'infini ses tableaux dans son style « métaphysique »

vendredi 12 mai 2017

Louis Daguerre (1787-1851)


Louis Daguerre (1787-1851)
Nature morte minérale, 1839
Bibliothèque nationale de France 

Que voit -on ? une photographie de trois étagères sur lesquelles sont entreposés des fossiles et coquillages. Les coquillages sont entreposés sur l'étagère du bas ; l'étagère du milieu comportant surtout des fossiles de même que l'étagère la plus haute. Dans ce daguerréotype sans doute réalisé au Museum d'Histoire naturelle de Paris par Daguerre, on retrouve l'ordonnancement, sur plusieurs plans vertciaux, des natures mortes les plus classiques de Pompei avec le souvenir des natures mortes de Jacques Linard 

Rappel biographique:   Louis Daguerre, est un peintre et photographe français. Sa commercialisation du daguerréotype  qui inspira des travaux de Joseph Nicéphore Nièpce l'a fait considéré, pendant un temps, comme l'inventeur de la photographie. Louis Daguerre fut d'abord peintre avant de se convertir au métier de décorateur de théâtre pour lequel il exécuta des tableaux remarquables (notamment les décorations d'Aladin ou la Lampe merveilleuse à l'Opéra de Paris).
Il connaît son premier succès grâce au diorama, un spectacle conçu avec son associé Charles-Marie Bouton en 1822. Ces très grandes toiles translucides peintes en trompe-l'œil et animées par des effets d'éclairage variés donnaient aux spectateurs une illusion de réalité. Selon l'éclairage, la scène, représentée sur une toile de 22 mètres sur 14, passait du jour à la nuit, changeait la saison, etc.
Pour peindre ces immenses toiles de façon aussi réaliste que possible, Daguerre et Bouton utilisaient une chambre noire. Grâce à leur ingénieur-opticien commun Vincent Chevalier, Daguerre fit la connaissance, de Joseph Nicéphore Niepce, qui, après avoir reproduit photographiquement des gravures, entreprit de réaliser des « points de vue ». Intéressé, Daguerre écrivit une première lettre à Niepce en janvier 1826. Mondain, homme de théâtre, Daguerre impressionna fortement l'inventeur chalonnais lors de leur première rencontre à Paris pendant l'été 1827. Ils se mettent alors à correspondre. Nièpce est réticent à montrer les avancées de ses travaux « héliographiques », qui avaient débouché sur des premières images stabilisées. Cependant, l'entregent de Vincent Chevalier conduit les deux hommes à signer, le 14 décembre 1829 à Chalon, un contrat d'association, dans le but d'améliorer le procédé de Niepce par les perfectionnements que Daguerre y apporterait. Ce contrat stipule que l'invention, objet du traité, est due à Joseph Nicéphore Niepce. Mais la mort subite de Niepce le 5 juillet 1833 laissa le champ libre à Daguerre, qui put ainsi s'attribuer le mérite principal de l'invention de la photographie. De fait, en s'appuyant notamment sur les travaux de Bernard Courtois sur les propriétés de l'iode, qu'il utilisa comme agent sensibilisateur sur une plaque de cuivre recouverte d'une couche d'argent, il mit au point, entre 1833 et 1839, le procédé par lequel le monde prendra connaissance de la photographie et qu'il décida d'appeler Daguerréotype.
Après la mort de Niepce, Daguerre décida de poursuivre les recherches sur les propriétés photochimiques de l'iode. De 1835 а 1837, il  progressa sur les méthodes de développement et de fixation des images, en découvrant que la vapeur de mercure agit comme révélateur de l'image. Avec le principe du développement de l'image latente, Daguerre apporta une contribution majeure en trouvant le procédé qui raccourcit le temps de pose, jusqu'alors très long (plusieurs heures), à quelques dizaines de minutes.
En 1837, il parvint à fixer ces images avec de l'eau chaude saturée de sel marin. Le daguerréotype était né, sans que le nom de Niepce y fut associé.
Avant sa mort, Daguerre avait exigé que soit gravé sur sa tombe « Daguerre, Artiste Peintre, Chimiste, Inventeur de la photographie », ce qui fut fait. Il faudra quelques années pour que la paternité de l'invention, confisquée par Daguerre, soit définitivement rendue à Niepce. Ceci grâce aux initiatives d'un archiviste de Chalon-sur-Saône, Victor Fouque qui voulut sans doute défendre la mémoire d'un compatriote.

jeudi 11 mai 2017

William H. Johnson (1901-1970),


William H. Johnson (1901-1970)
Still life with fruit and bottles, 1939
Private collection, USA

Que voit on ?  Sur un entablement de bois vert qui semble être une console étroite posée contre une fenêtre, enfermés dans le cadre stricte d'une nappe blanche qui ne souffre aucune pliure : des fruits (bananes, pommes, oranges) posées dans un saladier de céramique bleu ou à même la nappe blanche ; à l'arrière plan : trois bouteilles de formes et de couleurs différentes dont l'une noire.

Rappel biographique :  William Henry Johnson est un peintre afro-américain, né à Florence (Caroline du Sud)  considéré par beaucoup comme l'un des grands peintres américains du 20e siècle.
Issu d'un mariage mixte, William Henry Johnson naît d'une mère noire avec des origines amérindiennes et d'un père blanc. À l'âge de 17 ans, il part s'installer à New York où il exerce de nombreux petits métiers afin de pouvoir se payer des études d'art. Il parvient à entrer à la National Academy of Design où, entre 1921 et 1926, il étudie différentes techniques sous la direction de Charles Webster Hawthorne qui parvient à lui obtenir une bourse de fin d'études en France.
De 1926 à 1929, il s’établit d'abord à Paris, se passionnant pour le mouvement expressionniste, en particulier pour Chaïm Soutine, dont il reconnaît l'influence sur ses premières œuvres. Durant un long séjour à Cagnes-sur-Mer, il rencontre l'artiste danoise Holcha Krake (1885-1943), de quinze ans son aînée, et avec qui il se marie.
Entre 1930 et 1938, il commence à voyager en Europe puis en Tunisie (1932) d'où il rapporte de nombreux tableaux ; Holcha, elle, s'inspire des techniques locales de tissage et de céramique. Le couple s'installe ensuite au Danemark, puis aux îles Lofoten et enfin sur l'île de Fionie. Ils organisent des expositions et tentent de vivre de leur art, Holcha se spécialisant dans le design textile et céramique. Fin 1938, le couple part s'installer à New York et connaît des difficultés financières. William parvient à intégrer le Federal Art Project, enseigne à Harlem et produit beaucoup : son art évolue vers des formes plus simples, contrastées, très imprégnées par la vie urbaine des quartiers qui l'entourent. Il se qualifie lui-même de  « artiste primitif ».
En 1943, son épouse, atteinte d'un cancer, meurt. William décide alors de retourner au Danemark vivre avec sa belle-famille. Malade à son tour, rattrapé par les symptômes d'une syphilis contractée sans doute dans sa jeunesse, il doit être interné, d'abord en Norvège, puis est rapatrié aux États-Unis avec tous ses tableaux. Sa lucidité étant atteinte, il est interné en 1947 dans une institution publique à Central Islip (Long Island) spécialisée dans les traitements neuro-psychiatriques. Il meurt en 1970, après 23 années d'internement.
Le legs de ses œuvres avait été entre-temps effectué auprès de la Harmon Foundation qui organisa en 1967 le transfert de tous ses travaux à la Smithsonian Institution grâce aux efforts de la conservatrice Adelyn Dohme Breeskin. La première rétrospective de William Johnson eut lieu en 1971 et son impact sur la communauté noire, mais pas seulement, est alors sensible, rendant à l'artiste sa place au sein de l'histoire moderne de la peinture américaine.
En 2012, la Poste américaine émet un timbre en l'honneur de William H. Johnson, le 11e de la série « American Treasures » qui rassemble les grandes figures artistiques américaines du 20e siècle.

mercredi 10 mai 2017

Tamara de Lempicka (1898-1980) - Le masque et la plume

http://astilllifecollection.blogspot.com

Tamara de Lempicka (1898-1980)
Le masque et la plume 1943
Collection Privée

Que voit-on ?  Sur un entablement qui semble être un chassis de tableau : une nature morte aux objets avec une feuille de papier blanche mise à plat après avoir été froissée et écornée ; un mouchoir rouge posé à la façon d'un rideau de théâtre ; deux cartes à jouer (l'as de coeur et le 9 de trèfle) ; un masque de carnaval dont un des orifices oculaire est transpercé par un plume d'oie, symbole de la célèbre collection de polars "Le Masque"  crée en 1925 par Albert Pigasse et dont le dernier ouvrage est paru en 2012. Cette nature morte de Tamara de Lempicka est d'ailleurs tout à fait dans l'esprit des couvertures des romans de la collection.

Rappel biographique : Tamara de Lempicka est une peintre polonaise représentative du mouvement Art déco. Fille de Boris Gorski, juif russe, et d'une mère polonaise, son enfance se passe dans un milieu aisé et cultivé entre Saint-Pétersbourg, Varsovie, Lausanne et Paris. En 1920, à l'Académie Ranson à Paris, elle reçoit l'enseignement de Maurice Denis et à l'Académie de la Grande Chaumière celui d'André Lhote. C'est là qu'elle forge petit à petit son style qui, dans une synthèse de l'art maniériste de la Renaissance et du néo-cubisme, va correspondre parfaitement à la mode de son temps. L'envol de sa carrière coïncide avec sa première exposition personnelle à Milan en 1925. En France, elle participe pleinement à la vie artistique et mondaine parisienne où elle rencontre André Gide, Suzy Solidor, de riches industriels, des princes russes émigrés, etc. En 1928, elle installe sa maison-atelier au no 7 de la rue Méchain, dans le 14e arrondissement, conçue par Robert Mallet-Stevens. A partir de 1929,  elle expose simultanément en Pologne (médaille de bronze à l'exposition internationale de Poznan), à Paris (dans quatre salons et à la galerie Colette Weil) et aux États-Unis (Carnegie Institute de Pittsburgh).
Tamara de Lempicka occupe une place à part dans l'art du 20e siècle : malgré une production modeste (à peine 150 tableaux dans sa meilleure période, qu'on situe entre 1925 et 1935), ses œuvres évoquent et reflètent le style et la mode des années folles de l'entre-deux-guerres. Avec une stylisation néo-cubiste, ses œuvres, principalement des portraits, se caractérisent par un modelé accentué, des couleurs vives mais dans une gamme restreinte, mises en valeur par des fonds gris ou noirs. La composition très resserrée s'inspire du cadrage cinématographique. Bien que la nature morte ne soit pas sa spécialité, elle en a peint une vingtaine.

2017 - A Still Life Collection 
Un blog de Francis Rousseau

mardi 9 mai 2017

Richard Diebenkorn (1922-1993) - Still Life with Scissors and Lemon


Richard Diebenkorn (1922-1993) 
Still Life with Scissors and Lemon
Private collection 

Que voit-on ?  Sur un premier plan rouge sont posés un pair de ciseaux grande ouverte et un citron.  La force communiqué par l'opposition  l'ouverture menaçante de ces ciseaux et le mystère de la fermeture de la sphère du citron est d'une telle intensité qu'il laisse le spectateur en arrêt devant cette composition.

Rappel biographique : Richard Diebenkorn est un peintre américain du 20e siècle dont le style navigue de l’abstrait au figuratif en fonction des périodes qu’il a traversées. Après une première exposition au California Palace of the Legion of Honor à San Francisco en 1948, ses débuts sont associés à l'expressionnisme abstrait et à l'Ecole de San Francisco, mouvement figuratif des années 1950-1960.  De 1955 à 1966,  il vit à Berkeley (Californie), change de style et devient un peintre figuratif important, dans un genre qui réunit  à la fois la manière de Henri Matisse qu’il admire et l'expressionnisme abstrait. Diebenkorn, Elmer Bischoff, Henry Villierme, David Park, James Weeks participent ensemble à une renaissance de la peinture figurative, qu'on appelle l'École de San Francisco (Bay Area Figurative Movement). En 1967, Diebenkorn s'installe à Santa Monica et devient professeur à l'UCLA. Il installe son atelier dans le même immeuble que son vieil ami Sam Francis. Pendant l'hiver 1966-1967, il revient une nouvelle fois à l'abstraction, cette fois avec une vision très personnelle, un style géométrique qui se démarque clairement de ses débuts de la période expressionniste abstraite. La série Ocean Park, qu’il commence en 1967 se poursuit pendant les  dix-huit années suivantes. Elle est devenue la partie de son œuvre la plus célèbre aujourd’hui. Elle se compose d'environ 135 peintures. Basées sur le paysage vu depuis la fenêtre de son atelier, ses compositions abstraites à grande échelle sont nommées d'après une communauté de Santa Monica où il a eu un temps son atelier. A la même époque, il peint aussi ce qu’il appelle des found still life,  c’est a dire des toiles d’après ce qu’il trouve sur sa table san rien retoucher à l’arrangement qu’il voit (c'est le cas du tableau présenté ici).
La première rétrospective importante de son oeuvre a eu lieu à la Albright–Knox Art Gallery а Buffalo en 1976 et 1977.  En 1989, John Elderfield, conservateur au MOMA (New York) organise une exposition d’oeuvres de Diebenkorn sur papier, qui constitue d’ailleurs la partie la plus prolifique de sa production.
En 2012, l'exposition Richard Diebenkorn : The Ocean Park Series, organisée par Sarah C. Bancroft, a lieu simultanément à la Corcoran Gallery of Art,  à l'Orange County Museum of Art et au Forth Worth Museum of Modern Arts de Washington.

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2017- A Still Life Collection
Un blog de Francis Rousseau




lundi 8 mai 2017

Salvador Dalí (1904-1989) - Croix Nucléaire


Salvador Dali (1904-1989) 
 Croix Nucléaire, 1952
 Fundació Gala-Salvador Dalí. 

Que voit-on ?  Dans les natures mortes de l'âge d'or le pain a une double signification : il symbolise l'hospitalité, la charité mais aussi l’Eucharistie. Le pain représente la consolation de celui qui a faim au sens physique et spirituel. Si Dali accentue parfois la signification du sens physique, il garde pourtant présente à l'esprit la signification religieuse .  « Le pain a toujours été l’un des thèmes les plus fétichistes et obsessionnels de mon travail, c’est celui auquel je suis resté le plus fidèle » déclara Dali en 1945. Dans cette composition, le pain de forme ronde - symbole on ne peut plus évident de l'Eucharistie - apparait enchâssé dans une croix faite de barres d'uranium, alignées exactement comme elles le sont dans le réacteur d'une centrale nucléaire. C'est la première fois que l'uranium est utilisé comme élément d'une nature morte. 

Rappel biographique : Salvador Domingo Felipe Jacinto Dalí i Domènech, connu comme Salvador Dalí, marquis de Dalí de Púbol, est un  peintre, sculpteur, graveur et écrivain catalan de nationalité espagnol, considéré comme l'un des principaux représentants du surréalisme et comme l'un des plus célèbres peintres du 20e siècle... en tout cas l'un des plus médiatisés de son vivant ! Les thèmes qu'il aborda le plus fréquemment furent le rêve, la sexualité, le comestible, sa femme Gala et la religion. La nourriture, et l'acte de manger, ont une place centrale dans l'œuvre et la pensée dalinienne pour qui « la beauté sera comestible ou ne sera pas ». La création picturale peut-être la plus connue de Dalí est Montres molles. Elles coulent comme un camembert et dans l'explication surréaliste qu'il en donnera il dira  « Les montres molles sont comme du fromage, et surtout comme le camembert quand il est tout à fait à point, c’est-à-dire qui a la tendance de commencer à dégouliner. Et alors, mais quel rapport entre le fromage et le mysticisme ? […] Parce que Jésus, c’est du fromage. » 
Figure picturale essentielle, le pain fut très présent dès 1926.  Après le pain, thème rémanent dans ses natures mortes, l'œuf au plat sans le plat revient régulièrement dans son œuvre.  Figure picturale essentielle, le pain fut très présent dès 1926 dans l'œuvre de Dali. La très classique Corbeille de pain (1926), et  La corbeille de pain, Plutôt la mort que la souillure (1945) qui reprend le thème classique de la précédente furent exposées à une place d'honneur par Dalí au musée de Figueras, exprimant l'importance qu'il leurs accordait. Ce fut d'ailleurs avec une baguette de pain de 2 mètres qu'il débarqua aux États-Unis pour la première fois suscitant l'étonnement des médias locaux d'alors qui y virent le symbole de la France, alors que le symbole était bien entendu double !  Et au cas justement ou l'on aurait mal interprété son geste, il  réitéra en France cette fois dans une conférence parisienne qu'il donna en 1959 en se présentant avec une baguette de pain de 12 mètres de long, " Trrrriom-phalliquement " portée par plusieurs boulangers. Salvador Dalí  réalisa plus de 1500 toiles dans sa vie, et produisit également des illustrations de livres, des lithographies, des costumes de théâtres, un grand nombre de dessins, de sculptures, d'objets et plusieurs films.


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dimanche 7 mai 2017

Robin Stacey (bn.1952) - Help yourself !


Robin Stacey (bn.1952), Help yourself ! (2011) National Gallery of Australia
 
Robin Stacey (bn.1952),
Help yourself ! (2011)
National Gallery of Australia

Que voit on ? Sur un entablement noir qui se confond avec un fond noir, un cornet en papier Kraft d'où débordent comme d'une corne d'abondance largement ouverte, des berlingots, nougats, guimauves, boules de réglisse, barres chocolatées et sucreries en tout genre...  traitées à la façon des grandes natures mortes de pâtisseries et douceurs du 17e siècle hollandais mais avec l'humour et les couleurs de l'enfance en plus.  

Rappel biographique :  Désormais classée parmi les photographes les plus reconnues d'Australie, Robyn Stacey a commencé à créer des images spectaculaires au milieu des années 1980. Ses natures mortes, somptueuses reproductions de festins sur le modèle des peintres hollandais de l'âge d'or ou ses interprétations décalées des grands thèmes du genre pour les adapter au 20e siècle (comme les bonbons de Help yourself)  l'ont rapidement propulsée sur le devant de la scène photographique contemporaine australienne.  Depuis 2013, elle a entamé un nouveau travail qui consiste à transformer des salles entières en Chambres obscures en masquant les fenêtres pour ne laisser passer qu'un rayon de lumière qui, comme par magie, laisse entrer la vue extérieure à l' intérieur de la pièce, mais à l'envers. 
Stacey a présenté des travaux dans de nombreuses expositions en solo et en groupe, dont récemment Magic Object: The Adelaide Biennal of Australian Art à la Galerie d'art de l'Australie du Sud en 2016, et Robyn Stacey: Cloud Land au musée de Brisbane en 2015. Lauréate de nombreux prix, son travail  est désormais conservée dans des collections publiques les plus célèbres de son pays comme la National Gallery of Australia,  la National Portrait Gallery, l'Art Gallery of New South Wales, Art Gallery of Western Australia, National Gallery of Victoria, Art Gallery of South Australia, Queensland Art Gallery, The City of Sydneyet le  Samstag Museum and Artbank...
Trois publications importantes, Home (2011), Museum (2007) et Herbarium (2004), offrent un aperçu unique de ses oeuvres conservées dans les  collections du Sydney Living Museums, de la Macleay Collection of Entomology et du  Royal Botanic Jardins de Sydney.