mardi 4 mars 2014

Pieter Claesz (1597-1661) - Vanité



Pieter Claesz (1597-1661)
Vanité (1630)
Mauristhuis, La Haye

Que voit-on ? Un crâne posé sur une pile de papiers et de livres usagers, à côté  d'une plume, d'un tibia, d'un verre vide et  renversé, d'un encrier et d'un bougeoir vide. Ces éléments positionnés de manière désordonnée constituent les éléments habituels des vanités. Le crâne et le tibia rappellent le destin inéluctable de l’être vivant, le verre vide et renversé fait allusion à la fragilité et à l'inconsistance de la vie. La plume, ainsi que les écrits, évoquent la recherche de réponses aux questions des problèmes philosophiques ou métaphysiques. Quant au bougeoir vide, il rappelle que la vie est éphémère et que le temps inexorablement s'est écoulé.



Rappel biographique : Le peintre Pieter Claesz  ou Pieter Claesz Van Haarlem  (du nom de la ville ou il fut le plus actif), est un des plus grands représentants de la nature morte hollandaise de l'époque baroque, un maître auquel la plupart des peintres de natures mortes se sont référés à un moment ou a un autre de leur carrière.  Willem Claeszoon Heda avec lequel on peut le confondre tant celui ci s'inspira de  Pieter Claezs jusqu'à signer ses tablaux de son prénom abrégé (Claez), il fut l’un des peintres les plus importants de ce genre très diversifié qu'est la nature morte.
Au 17 siècle, les natures mortes se divisaient en plusieurs catégories :
pronkstilleven  (natures mortes d’apparat),  comme c'est le cas ici, dans cette Nature morte à la tourte avec une dinde,  dans lesquelles sont représentés des coupes en argent ou en or lourdement décorées, des nautiles, des verres de vins, et beaucoup de fruits ou de fleurs. Beaucoup d’aliments composent ces natures mortes comme du pain, du fromage, du vin, des huîtres, du poisson, de la volaille, du jambon, des olives et des noix. Le citron est également souvent représenté, comme touche jaune dans la palette monochromatique. Il faut savoir  toutefois que Pieter Claesz introduisait rarement des fruits dans ses peintures. Quand il le faisait, c'était toujours sur la demande du commanditaire  Dans ce cas Claesz recours à un de ses collègues peintres, Roelof Koets, qui était chargé de remplir  alors le quart ou la moitié du tableau de fruits et de feuilles de vigne et y plaçait une corbeille ou une porcelaine. Les deux peintres signaient alors le tableau, Claesz lui-même signait des initiales PC, ou PCH (« H » pour Haarlem) comme c'est le cas ici. 
-  ontbijtgens  (petits déjeuners) qualifiant des natures mortes avec du pain, des couteaux, et du poisson et qui correspondait à ce que l’on mangeait dans un repas situé en fin de matinée.
banketgens  (petits banquets) qualifiant des natures mortes dans lesquelles était représenté  spécifiquement et exclusivement un pâté bien rempli. 
toebackjes ( petits tabacs) : qualifiant des natures mortes contenant du tabac, une pipe, et d'autres objets du même type.
les vanités enfin, natures mortes qui renvoient à la mort et au caractère éphémère de la vie et du plaisir et que Claesz a peint en nombre important. Dans ce cas, il peint des bougies éteintes ou complètement consumées, des instruments de musique, des montres, de vieux livres, des ustensiles d'écriture telle qu'une plume d’oie, qu'il place en perspective des crânes. Ces Vanités de Claesz étaient destinées à encourager le public à mener une vie simple et religieuse et a tempérer les excès de plaisir auxquels invitaient ses autres natures mortes. 
Bien que très construites et obéissant a un style très défini,  une évolution dans la composition des natures mortes de Claez est perceptible. Si, au début, il disposait fréquemment les objets en croix ou dans une diagonale rigoureuse, par la suite il utilisa beaucoup plus le chevauchement des objets, ce qui crée une plus grande profondeur. En outre, au cours de sa vie, il élargit son point de vue  et la vue latérale sur la table de la nature morte devient plus fréquente que la vue en plongée.
Claesz, souvent, utilisa les mêmes objets dans ses natures mortes : un couteau avec un lourd manche en nacre,  une bouteille de verre brun, des assiettes en étain et des cruches à col de cygne, ainsi que de fin coquillages  des porcelaines importés de Chine.  On retrouve ces éléments d'une nature morte à l'autre, on les reconnait comme des objets familiers. Souvent, un verre est représenté couché, ce qui confère une certaine tension à la composition.
Si, au début de sa carrière, Claesz utilisait assez souvent des couleurs vives, il adoucit considérablement sa palette par la suite, employant des couleurs presque monochromatique et conférant ainsi à ses tableaux une  atmosphère plus intimiste. 
L’utilisation qui est faite de la lumière et de l’ombre par Claesz est remarquable. Il  donner un tel rendu des textures par  l'effet de la lumière sur les surfaces, que l'on peut reconnaître immédiatement une assiette en étain d’une assiette en argent, un roemer d'un pot en céramique. Cette maîtrise dans le traitement de la matière et des textures (les reflets du vin dans les verres sont des effets de pur génie !) est une caractéristique partagée par plusieurs peintres néerlandais du 17e siècle. C'est ce qui fait leur spécificité..  
Claesz, avec Heda, fut à l’origine d’une véritable école de la nature morte, donnant à ce genre un statut véritablement noble.   À partir de 1628, une sérieuse concurrence apparaît à Haarlem entre Pieter Claesz et Willem Claeszoon Heda, lequel s’inspirait fortement de lui et le suivait de près dans toutes ses innovations.
Nicolaes Berchem, le fils de Claesz, fut  quant à lui un peintre de paysage  très réputé.
En 2004/ 2005, une exposition itinérante rassemblant quarante-cinq œuvres de Claesz fut montée et présentée au Musée Frans Hals à Haarlem, ensuite au Kunsthaus de Zurich, et enfin au National Gallery of Art de Washington.




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