Henri Matisse (1869-1954)
Nature morte à la nappe bleue, 1909.
Hermitage Museum, St Petersbourg
Que voit on ? Matisse reprend ici la toile de Jouy qui, un an auparavant, lui avait fait entreprendre La Desserte rouge mais en conservant la couleur réelle bleue de l'étoffe et en stylisant les motifs. L'artiste déplie le tissu sur la table comme une nappe et laisse apparaitre le reste de la pièce dans un minuscule espace sur coin droit de la toile. Plusieurs éléments sont posés sur cette toile, estompant tout effet de perspective : au centre, un compotier rempli de fruits (pêches?) ; à droite : un carafe-décanteur à vin vide ; à gauche : une chocolatière en cuivre déjà présente dans certaines de ses natures mortes, mais aussi dans celles de Chardin. Par rapport a ces précédentes représentations, cette chocolatière a perdu son arrogant éclat métallique original et adopte des ocres dans lesquels Matisse trouve le contraste juste avec le bleu de l'étoffe.
Rappel biographique : Henri Matisse, peint son premier tableau, Nature morte avec livres et chandelle en juin 1890, à l'âge de 21 ans Peu après, il se rend à Paris. En 1892, il rencontre Albert Marquet à l'École des Arts déco puis s'inscrit en 1895, à l'École des beaux-arts, dans l'atelier de Gustave Moreau. L'enseignement du maître encourage ses élèves à penser leur peinture, à la rêver, au-delà de la virtuosité technique. Matisse, comme ses condisciples, Georges Rouault, Léon Lehmann, Simon Bussy, Eugène Martel, Albert Huyot ou Henri Evenepoel, est stimulé par cette conception de la peinture et entend développer la sienne selon son individualité. Gustave Moreau, lors d'une correction d'un de ses premiers dessins, lui dit : « Vous allez simplifier la peinture. »
Cette prophétie peut être considérée comme le programme esthétique de l'œuvre d'Henri Matisse.
En 1896, Matisse expose pour la première fois au Salon des Cent et au Salon de la Société nationale des beaux-arts, dont il devient membre associé sur proposition de Pierre Puvis de Chavannes. Cette fonction lui permet notamment d'exposer sans passer par un jury. Il passe l'été à Belle-Île-en-Mer et rencontre l'Australien John Peter Russell, qui l'introduit auprès d'Auguste Rodin et Camille Pissarro. Il commence à s'intéresser à la peinture impressionniste qu'il découvre en 1897 au musée du Luxembourg. Il est alors un peintre classique de natures mortes réalistes aux textures amples. Pour gagner sa vie, Matisse et Marquet travaillent comme peintre décorateurs à la journée, pour les décorateurs de théâtre.
En voyage à Londres, sur les conseils de Pissarro, Matisse découvre la peinture de Joseph Mallord William Turner, puis il part s'installer en Corse où il habite dans la Villa Rocca. A Ajaccio, il peint une cinquantaine de toiles dont Le Mur rose qui représente l'arrière de l'hospice Eugénie vu depuis la Villa de la Rocca. Matisse s'inspire alors de Turner.
En 1899, il découvre le traité de Paul Signac, d’Eugène Delacroix au néo-impressionnisme.
À partir de 1900, Matisse travaille la sculpture et le modelage, à l'Académie de la Grande Chaumière, sous la direction d'Antoine Bourdelle et fréquente également l'atelier d'Eugène Carrière. Il y fait la connaissance d'André Derain et de Jean Puy. Derain lui présente Maurice de Vlaminck. Il expose au Salon des indépendants (1901) et participe à la première édition du Salon d'automne (1903)
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