Édouard Manet (1832-1883)
Nature morte aux Pivoines et autres fleurs c.1880
Museum Boijmans van Beuningen.
Que voit-on ? Ce que décrit le titre... et surtout ce qu'il ne décrit pas : une splendeur absolue de Manet !
Rappel biographique : Le peintre français Édouard Manet est
un peintre majeur de la fin du 19e siècle, initiateur de la peinture
moderne qu'il libère de l'académisme, C'est une erreur de considérer
Édouard Manet comme l'un des pères de l'impressionnisme : il s'en
distingue en effet par une facture soucieuse du réel. Manet n'utilise
pas (ou peu) les nouvelles techniques de la couleur et le traitement
particulier de la lumière, utilisées par les impressionnistes. Il s'en
rapproche cependant par certains thèmes récurrents comme les portraits,
les paysages marins, la vie parisienne ou encore les natures mortes,
tout en peignant de façon personnelle, dans une première période, des
scènes de genre (sujets espagnols et odalisques entre autres). On a
beaucoup dit que lorsque Manet avait peint des natures mortes, c'était
surtout pour des raisons financières qu'il l'avait fait. Il avouait
lui-même avoir plus de facilités à les négocier que ses portraits. Cela
ne signifie pas qu'elles aient été d'un intérêt mineur pour lui bien au
contraire : la scénographie qu'il impose à ses natures mortes est tout
simplement prodigieuse, qu'il s'agisse de solo comme Le citron ou
L'asperge ou de mise en scène collectives comme dans Fruits sur la table
ou Le Panier de fruits ou d'hommage à d'illustres maitres comme cet
hommage à Chardin
Manet aimait authentiquement les natures mortes : « Un peintre peut
tout dire avec des fruits ou des fleurs, ou des nuages seulement »,
affirmait-il. Une part non négligeable de son œuvre est consacrée à ce
genre, avant 1870 surtout puis dans les dernières années de sa vie où la
maladie l'immobilise dans son atelier. Certains éléments de ses
tableaux constituent de véritables natures mortes comme le panier de
fruits dans Le Déjeuner sur l'herbe, le bouquet de fleurs dans Olympia
ou le pot de fleurs, la table dressée et différents objets dans Le Petit
déjeuner dans l'atelier. Il en va de même dans les portraits avec le
plateau portant verre et carafe dans le Portrait de Théodore Duret ou la
table et les livres dans le Portrait d’Émile Zola. Mais les natures
mortes autonomes, qui se revendiquent comme telles, ne manquent pas dans
l’œuvre de Manet !
Considérant l'importance de la nature morte chez
Manet, beaucoup – et cela dès les années 1890 – y ont vu la marque la
plus évidente de la révolution qu'il accomplissait, l'avènement d'une
peinture uniquement préoccupée d'elle-même et débarrassée de la tyrannie
du sujet. En refusant toute hiérarchie à l'intérieur même du tableau,
en donnant autant d'importance à l'accessoire qu'à la figure, Manet
assurément rompait avec les règles académiques. (...) Comme Cézanne et comme Monet
qu'il influencera, Manet trouvait dans la nature morte, obéissante et
disponible, un laboratoire d'expériences colorées dont il répercutait
aussitôt les trouvailles dans d'autres compositions ; comme Cézanne et
comme Monet, il dit cette curieuse obsession de l'éclatante blancheur et
voulut peindre lui aussi ces tables servies avec leurs nappes blanches
"comme une couche de neige fraîchement tombée" (Nature morte avec melon et pêches,
National Gallery of Art, London). Manet, peintre de natures mortes, a
médité les grands exemples anciens, celui des Espagnols et de leurs
bodegones, celui des Hollandais et bien sûr celui de Chardin.
Dans les années 1860, il joue des franches oppositions du noir et du
blanc, bois sombre de la table, éclat d'une nappe ou serviette sur
lesquelles il dispose ses notes colorées.
A sa mort, Édouard Manet
laisse plus de 400 toiles, des pastels, esquisses et aquarelles. Ses
œuvres sont aujourd'hui visibles dans les plus grands musées du monde.
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