mercredi 12 décembre 2018

Juan Gris (1887‑1927) - Le livre


Juan Gris (1887‑1927)
Le livre (Nature morte avec un livre), 1911 
Huile sur toile  (55x 46cm)
Centre Pompidou, Paris (Donation Louise et Michel Leiris, 1984)

 Que voit on  ? Une Cette nature morte très proche pour neaps dire jumelle dans sa palette  de Bouteille et Cruche conservée au Kroller Muller Museum et déjà publiée dans  ce blog. Les deux natures morts datent de la même année  1911, combine les mêmes éléments quotidiens mais surtout s'expriment dans une gamme de couleurs très similaires. 
Dans la Notice du Centre Pompidou sur cette oeuvre, on peut lire  : 
" Installé au Bateau-Lavoir dès 1907, tout près de son compatriote Picasso, Juan Gris se trouve placé au cœur du laboratoire cubiste. Il ne commence pourtant à peindre qu’en 1911, avec une série de natures mortes où l’on retrouve, diversement combinés, les mêmes objets usuels : ici une cafetière bien parisienne, un bol et un livre, voisinant avec une gargoulette évoquant l’Espagne. Gris fait déjà circuler entre leurs formes simplifiées les échos et les rimes visuelles qui caractériseront ses travaux ultérieurs. Surtout, il manifeste dans Le Livre (cat. rais. n° 3, anc. coll. Marcoussis et Eluard) la subtilité de sa compréhension de l’œuvre de Cézanne – et les qualités toutes personnelles de « simplicité », de « modestie », de « probité », saluées par son marchand, Daniel-Henry Kahnweiler, dans le texte qu’il consacre en 1928 à son ami récemment disparu. 
Poursuivant son analyse des premières toiles, Kahnweiler souligne : « Chaque objet est décrit avec un soin minutieux ; sa forme est montrée par le clair-obscur, sa couleur est indiquée mais se trouve décolorée par la tonalité générale. Le fond […] s’articule avec les objets et les intervalles au moyen de répétitions de formes qui sont justifiées, au point de vue imitatif, comme ombres ou comme reflets. » (Juan Gris , Paris, 1990, op. cit. , p. 204).
L’amorce de facettes, les cernes brisés qui définissent chacun des quatre objets, la douceur des passages et la restriction des couleurs renvoient aux paysages proto-cubistes (fin 1907-début 1908) de Braque. Avec un décalage de quelques années, Gris commence lui aussi par affermir ses bases, et par se mettre, avec la même patiente humilité, à l’école de Cézanne.

Rappel Biographique : Juan Gris vécut et travailla en France à partir de 1906.  Il fut proche du mouvement cubiste mais il occupa en même temps une place très à part dans la peinture de son temps, sans doute toujours dans l'ombre de Picasso qui l'aurait volontiers  " éliminé de la carte "  selon les dires de Gertrude Stein. Salvador Dali disait de lui : « Juan Gris est le plus grand des peintres cubistes, plus important que Picasso parce que plus vrai.  Picasso était constamment tourmenté par le désir de comprendre la manière de Gris dont les tableaux étaient techniquement toujours aboutis, d'une homogénéité parfaite, alors qu'il ne parvenait jamais à remplir ses surfaces de façon satisfaisante, couvrant avec difficulté la toile d'une matière aigre. Il interrogeait sans cesse : « Qu'est-ce que tu mets là ? — De la térébenthine. » Il essayait le mélange, échouait, abandonnait aussitôt, passant à autre chose, divin impatient. »
Aujourd'hui Juan Gris apparait comme un génie injustement resté dans l'ombre. Il a peint quasiment autant de natures mortes que de paysages ou de portraits.

Jusqu’en 1920, sa peinture est encore marquée par l’Espagne, celle des natures mortes de l’école de Séville des 16e-17e siècles – d’un José Sanchez Cotan, d’un Valdes Léal ou d’un Zurbaran, par exemple – Gris aime profondément ces peintures des « blancs chartreux qui, dans l’ombre, glissent silencieux sur les dalles des morts ». Des blancs contrastant avec les noirs, il va donc tirer le parti le plus fort.
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2018 - A Still Life Collection
Un blog de Francis Rousseau

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