César (1921-1998)
Compression de casiers de bouteilles, 1970
Pièce unique
Collection Ferrero
Que voit on ? : un enchevêtrement de matière métallique issue de plusieurs casiers de bouteilles, compressés selon la célèbre technique de ce sculpteur. Une œuvre que César s'amusait à présenter, non sans une certaine malice, comme une nature morte. Nous lui emboîtons donc le pas ! Selon Serge Lemoine,"Compression de casiers de bouteilles" est l’une des plus remarquables Compressions de César "dans la mesure où elle diffère des Compressions « classiques ». Il ne s’agit pas d’un bloc monolithique, opaque et dressé verticalement mais plutôt d’une stèle, peu profonde, à l’aspect ajouré. Le matériau de départ explique le rendu final : des casiers métalliques de bouteilles dont la compression provoque cet entrelacs de tiges et de barres de métal tordues, qui reste par endroits transparent et dans lequel viennent jouer en profondeur l’ombre et la lumière. En même temps, par l’embrouillamini de ses formes, cette œuvre se présente, à l’image des tirs de Niki de Saint-Phalle et des machines à dessiner de Tinguely, comme une satire de la peinture tachiste et gestuelle qui a donc ici été exécutée par une machine. "
Rappel biographique : Le sculpteur français César Baldaccini, dit César, fait partie des Nouveaux réalistes, mouvement né en 1960. À partir de cette date, César centre son travail sur la technique de la « compression dirigée », qui devient sa marque de fabrique : à l'aide d'une presse hydraulique, il compresse des objets divers. Sa première Compression date de cette année 1960 et signe son admission au groupe des Nouveaux Réalistes qu’avait fondé (la même année) Pierre Restany avec Yves Klein, Jean Tinguely, Arman, Daniel Spoerri, Martial Raysse, Christo, Niki de Saint-Phalle, Raymond Hains, Jacques de La Villeglé, Mimmo Rotella. Excepté Yves Klein.
Tous ces artistes réalisent leurs œuvres avec des matériaux existants, neufs ou de récupération et des déchets qu’ils utilisent tels quels ou qu’ils transforment, dans un style et avec une démarche souvent proches du dadaïsme et en particulier de l’art de Kurt Schwitters. Le groupe des Nouveaux réalistes a beaucoup à voir avec les artistes britanniques et américains du mouvement du Pop Art, qui puisent effectivement, pour Eduardo Paolozzi, Richard Hamilton et Robert Rauschenberg, aux mêmes sources.
Les Compressions de César ont fait, à juste titre, très rapidement sensation dans le monde de l'art et dans le public où elles sont devenues très populaires, ce qui est assez rare pour des oeuvres d'art contemporaines. Elles s’inscrivent à la fois dans la « tradition » de la sculpture monolithique et verticale et dans la pratique du collage et de l’assemblage telle qu’elle a été initiée par les cubistes et développée par les dadaïstes. César y ajoute un geste radical en faisant réaliser l’œuvre par une machine qui délivre un bloc ne présentant pas de composition, sans arrangement de formes, avec pour seul effet « artistique » des surfaces animées sur chacun de ses côtés par la nature de ses constituants. César utilisera rapidement toutes sortes de matériaux qu’il sélectionnera par catégorie : plaques de tôle émaillée, bidons, canettes de boisson, radiateurs d’automobiles, montres et jusqu’aux emballages de carton, dans une démarche identique à celle d’Arman avec ses Accumulations.
Il crée le scandale en présentant trois voitures compressées au Salon de Mai mais il doit attendre que la galerie Mathias Fels présente ces œuvres transgressives en 1969 pour qu'elles soient reconnues par le monde de l'art. La vicomtesse de Noailles, mécène, qui lui offre sa première voiture (une Zil soviétique toute neuve, la seule à Paris) a la surprise de voir César la lui renvoyer compressée, ayant perdu 90 % de son volume. D'autres automobiles vont aussi subir le même sort. Cet acte d'appropriation se veut un défi à la société de consommation et une provocation publique.
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