Jean-Baptiste-Siméon Chardin (1699-1779)
Lièvre avec besace et cartouche de poudre (1730)
Philadelphia Museum of Art
Ce que l'on voit : Un lièvre mort attaché par un fil à la patte et présenté tête bêche avec quelques ustensiles de chasse sur un fond qui se confond avec les nuances du pelage de l'animal. Jean-Baptiste-Siméon Chardin n'avait aucun intérêt particulier pour la peinture des trophées de chasse dans lesquels les peintres hollandais s'étaient illustrés au 17e siècle, à grands renforts d'amoncellement de cadavres de bestiaux, de ruissellement de sang et de viscères. Lorsque l'on commanda à Chardin ce genre de trophées de chasse, il fit comme pour les natures mortes végétales, il adapta le genre à sa propre sensibilité et, du même coup, le transforma radicalement. Ainsi dans cette première série de trophées de chasse peintes autour de 1730, où il peint des lièvres morts au milieu de quelques ustensiles simples utilisés par les chasseurs, comme que le flacon de poudre en corne et la besace, accessoires qui apparaissent régulièrement dans bon nombre de ses autres peintures. Cette thématique est un prétexte pour Chardin à explorer les propriétés des matériaux, les différence de texture set les jeux de la lumière sur les objets, tout à fait dans le droit de fil de ce qu'il avait initié avec son tableau La raie peint deux ans avant celui-ci et qui l'avait fait remarquer de l'Académie Royale de peinture. Marqué par sa simplicité et son extrême dépouillement (en comparaison des tableaux du même genre que pouvait peignait à la même époque le grand spécialistes des trophées de chasse, les deux français Alexandre-François Desportes et Jean-Baptiste Oudry), ce Lièvre avec besace et cartouche de poudre est presque monochromatique. La palette choisie oblige le spectateur à un effort visuel inédit jusque là et qui fait de cette représentation un chef d'œuvre d'une modernité qui étonne encore aujourd'hui tant les similitudes avec à le style impressionniste sont grandes.
Rappel biographique : Célèbre pour ses scènes de genre et ses pastels, Chardin est aussi reconnu pour ses natures mortes dont il reste le maître incontesté. D'après les frères Goncourt, c'est Coypel qui en faisant appel à Chardin pour peindre un fusil dans un tableau de chasse, lui aurait donné le goût pour les natures mortes. Ces deux tableaux de réception à l'Académie Royale de peinture sont tous deux des natures mortes, La Raie et Le Buffet qui se trouvent aujourd'hui au Musée du Louvre. Chardin devient ainsi peintre académicien « dans le talent des animaux et des fruits », c'est-à-dire au niveau inférieur de la hiérarchie des genres alors reconnus. Et c'est sans aucun doute Chardin qui va lui donner ses lettres de noblesse et en faire un genre pictural égal, voire même supérieur à bien des égards, aux autres. Les natures mortes qu'il peindra plus tard (à partir de 1760) sont assez différentes des premières. Les sujets en sont très variés : gibier, fruits, bouquets de fleurs, pots, bocaux, verres... Chardin semble s'intéresser davantage aux volumes et à la composition qu'à un vérisme soucieux du détail, ou aux effets de trompe-l'œil. Les couleurs sont moins empâtées. Il est plus attentif aux reflets, à la lumière : il travaille parfois à trois tableaux à la fois devant les mêmes objets, pour capter la lumière du matin, du milieu de journée et de l'après-midi. On peut souvent parler d'impressionnisme avant la lettre.
2015 - A Still Life Collection
Un blog de Francis Rousseau, #AStillLifeCollection, #NaturesMortes
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