jeudi 25 mars 2021

Jean-Baptiste-Siméon Chardin (1699-1779) - Nature morte avec les attributs des arts, 1766


nature morte, still life, Jean-Baptiste-Siméon Chardin, Nature morte avec les attributs des arts 1766,  huile sur toile, Musée de l'Ermitage,  Hermès,  livres, pièces de monnaies, samovar, Saint Petersbourg


Jean-Baptiste-Siméon Chardin (1699-1779)
Nature morte avec les attributs des arts, 1766
Musée de l'Ermitage, Saint Petersbourg

Que voit on ? Plusieurs compositions de Chardin portent ce titre des Attributs des Arts. L'une se trouve au Louvre Paris et consiste en un dessus de porte commandée en 1764 pour le Château royal de Choisy, où elle fut le pendant des Attributs de la Musique. Une autre, propriété du Musée Jacquemard-André à Paris, fait pendant des Attributs des Sciences commandées par Conrad de Rothenburg pour orner sa bibliothèque de la Rue du Regard.  Une autre Nature morte aux Attributs des Arts propriété du Musée Pouchkine date de 1750 et  présente un buste d'Hermès avec sa coiffe ailée, cependant différent de celui de la nature morte ci-dessus, commandée en 1766 pour l'Académie des Beaux art de St Petersbourg, qui présente elle aussi une statue d'Hermès mais en entier. Lors de sa présentation, la toile  charma  " par sa composition sobrement ordonnée et par son coloris délicat et sûr ". L'Hermès mis en scène dans cette nature morte  est à mi-chemin entre L'Hermès Ingenui copie d'un original grec du Ve siècle avant JC, propriété du Musée Pio Clementino au Vatican et des Hermès (plus espiègles) qui peuplent les allées des jardins du Château de Versailles. Il est entouré de plusieurs objets dont  palette de peintre, un briquet, quelques pièces d'argent, des papiers, des livres des cartons, une sorte de samovar et une croix d'une Ordre russe. Toutes ces natures mortes étaient destinées à orner des dessus de porte et donc à être vues d'en dessous.

 
Rappel biographique : Jean-Baptiste-Siméon Chardin est considéré comme l'un des plus grands peintres français et européens du 18e siècle. Célèbre pour ses scènes de genre et ses pastels, il est aussi reconnu pour ses natures mortes dont il reste le maître incontesté. D'après les frères Goncourt, c'est Coypel qui en faisant appel à Chardin pour peindre un fusil dans un tableau de chasse, lui aurait donné le goût pour les natures mortes. A partir du Salon de 1748, Chardin expose de moins en moins de scène de genre, il multiplie désormais les natures mortes. Ce retour à ce type de peinture va durer une vingtaine d'années. Il est difficile de donner des raisons à ce changement de cap. On sait que pendant cette période la vie de Chardin est en pleine mutation. Il se remarie, il reçoit une pension du roi. Il est désormais à l'abri du besoin. Ces deux tableaux de réception à l'Académie Royale de peinture sont tous deux des natures mortes, La Raie et Le Buffet qui se trouvent aujourd'hui au Musée du Louvre (salle 39) . Chardin devient ainsi peintre académicien « dans le talent des animaux et des fruits », c'est-à-dire au niveau inférieur de la hiérarchie des genres alors reconnus. Et c'est sans aucun doute Chardin qui va lui donner ses lettres de noblesse et en faire un genre pictural égal, voire même supérieur à bien des égards, aux autres.
  Les natures mortes qu'il peindra à partir de 1760 sont assez différentes des premières. Les sujets en sont très variés : gibier, fruits, bouquets de fleurs, pots, bocaux, verres... Chardin semble s'intéresser davantage aux volumes et à la composition qu'à un vérisme soucieux du détail, ou aux effets de trompe-l'œil. Les couleurs sont moins empâtées. Il est plus attentif aux reflets, à la lumière : il travaille parfois à trois tableaux à la fois devant les mêmes objets, pour capter la lumière du matin, du milieu de journée et de l'après-midi. On peut souvent parler d'impressionnisme avant la lettre.
Chardin cherchait à reproduire la matière, ces fruits semblent aussi vrais que nature, Diderot s'extasiait devant ce réalisme dans son compte-rendu du Salon de 1759 : " Vous prendriez les bouteilles par le goulot si vous aviez soif ". ou encore en 1763, " C'est la nature même; les objets sont hors de la toile et d'une vérité à tromper les yeux. (...)
 Pour regarder les tableaux des autres, il semble que j'ai besoin de me faire les yeux ; pour voir ceux de Chardin, je n'ai qu'à regarder ce que la nature m'a donné et m'en bien servir ".  " O Chardin ! ce n'est pas du blanc, du rouge, du noir que tu broies sur ta palette: c'est la substance même des objets, c'est l'air et la lumière que tu prends à la pointe de ton pinceau et que tu attaches sur la toile ".

__________________________________

2021 - A Still Life Collection
Un blog de Francis Rousseau

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.